⭐ LE MIROIR DES ÉTOILES

 ⭐ LE MIROIR DES ÉTOILES




Chapitre 1 — La Nuit où Tout a Brillé


La nuit était tombée sur le village de Brumeval, une nuit douce, presque veloutée, où les maisons semblaient dormir sous un manteau de silence. Dans le grenier d’une vieille bâtisse aux volets bleus, deux silhouettes félines s’éveillaient lentement, comme si la lune elle-même les avait appelées.

Nougat, le chat roux au pelage chaud comme un rayon de soleil, étira ses pattes avec un soupir de contentement. Ses moustaches frémirent : il sentait que quelque chose d’inhabituel flottait dans l’air. Une odeur de mystère, peut-être. Ou de promesse.

À ses côtés, Opaline, la chatte blanche aux yeux bleus profonds comme des lacs d’hiver, ouvrit un œil, puis l’autre. Elle ne parlait pas encore, mais Nougat savait qu’elle avait senti la même chose que lui. Opaline percevait toujours les choses avant tout le monde — les émotions, les changements, les secrets cachés dans les ombres.

« Tu sens ça, Opaline » murmura Nougat, sa voix douce comme un coussin de laine.
Elle hocha la tête, silencieuse, puis se leva avec la grâce d’un flocon de neige.
« Quelque chose nous appelle », répondit-elle enfin, sa voix légère comme un souffle.

Ils descendirent les marches grinçantes du grenier, traversèrent la maison endormie, et sortirent par la chatière qui donnait sur le jardin. Le ciel était clair, constellé d’étoiles si brillantes qu’on aurait dit qu’elles voulaient tomber dans leurs pattes.

Mais ce n’était pas le ciel qui les attirait.
C’était la lumière.

Une étrange lueur bleutée, douce mais insistante, émanait du vieux cabanon au fond du jardin. Un cabanon que personne n’utilisait plus depuis des années. Nougat sentit son cœur battre un peu plus vite — pas de peur, mais d’excitation. Opaline, elle, avançait déjà, comme guidée par une force invisible.

Quand ils poussèrent la porte du cabanon, un souffle d’air tiède les enveloppa. À l’intérieur, tout était différent de ce qu’ils connaissaient : les murs semblaient vibrer légèrement, comme s’ils respiraient. Et au centre de la pièce, posé sur un vieux tabouret, se trouvait un objet qu’ils n’avaient jamais vu.

Un miroir.
Mais pas n’importe lequel.

Son cadre était sculpté de petites étoiles argentées, et sa surface semblait onduler comme l’eau d’un lac. Une lumière douce en émanait, pulsant lentement, comme un cœur.

Opaline s’approcha la première.
« Ce miroir… il n’est pas ordinaire. Il nous attend. »

Nougat, un peu plus prudent, observa les reflets mouvants. Il y vit d’abord son propre visage, puis celui d’Opaline… puis autre chose. Des formes floues, des silhouettes d’enfants, des salles lumineuses, des machines étranges qui bipaient doucement.

« Tu as vu ça » s’exclama-t-il.
Opaline hocha la tête.
« Ce miroir montre des choses que nous ne connaissons pas encore. Des lieux où les enfants vont quand ils ont besoin d’aide. »

Nougat sentit une chaleur dans sa poitrine.
« Peut-être qu’il veut qu’on les aide, nous aussi. »

Alors, sans réfléchir davantage, ils posèrent chacun une patte sur le miroir.
La surface vibra, devint liquide, et une lumière éclatante les enveloppa. Ils fermèrent les yeux — pas de peur, mais de surprise — et quand ils les rouvrirent…

Ils n’étaient plus dans le cabanon.

Ils se trouvaient dans un immense couloir blanc, lumineux, mais pas agressif. Les murs étaient décorés de dessins d’enfants, de soleils, de nuages, de fusées colorées. L’air sentait la lavande et le savon. Des voix douces résonnaient au loin.

« Où sommes-nous » demanda Nougat, émerveillé.
Opaline sourit.
« Dans un lieu où les enfants viennent quand ils doivent passer des examens. Regarde, Nougat… le miroir nous a amenés ici pour comprendre. Pour pouvoir les rassurer. »

Au bout du couloir, une petite fille aux tresses brunes attendait, assise sur un banc. Elle serrait une peluche contre elle, les yeux un peu inquiets. Quand elle aperçut les deux chats, ses yeux s’illuminèrent.

« Oh… bonjour vous deux. Vous êtes perdus »
Nougat s’approcha doucement, ronronnant pour la rassurer.
Opaline monta sur le banc et posa sa tête contre la main de l’enfant.

« Je m’appelle Lila », dit-elle. « Je dois faire une… radio. Je ne sais pas trop ce que c’est. Ça me fait un peu peur. »

Nougat et Opaline échangèrent un regard.
Le miroir les avait amenés ici pour ça.
Pour être là, juste là, au moment où un enfant avait besoin d’être rassuré.

Opaline murmura :
« Nous allons apprendre avec toi, Lila. Et tu verras… ce n’est pas effrayant. C’est juste un voyage de lumière. »

La petite fille sourit timidement.
Et dans les yeux de Nougat, une certitude naquit :
Leur aventure ne faisait que commencer.

Chapitre 2 — Le Voyage à Travers la Lumière

Le couloir semblait s’étirer comme un ruban blanc, paisible et rassurant. Lila marchait entre Nougat et Opaline, sa petite peluche serrée contre elle. À chaque pas, elle jetait un coup d’œil aux deux chats, comme si leur simple présence suffisait à lui donner du courage.

Nougat avançait d’un pas souple, la queue légèrement relevée, comme un guide sûr de lui. Opaline, elle, marchait tout près de la jambe de Lila, sa fourrure blanche frôlant parfois la peau de l’enfant, comme une caresse silencieuse.

Au bout du couloir, une porte s’ouvrit doucement. Une femme en blouse bleue apparut, souriante, les yeux pétillants derrière ses lunettes rondes.

« Bonjour Lila. Je suis Zoé, la manipulatrice en radiologie. Tu viens faire une petite radiographie, c’est ça » Lila hocha timidement la tête.

Zoé s’accroupit pour être à sa hauteur. « Tu sais, une radiographie, c’est un peu comme si on prenait une photo magique de l’intérieur du corps. Pas une photo qui fait mal, pas une photo qui pique. Juste une lumière très spéciale qui traverse ton corps pour montrer ce qu’il y a dedans. »

Lila ouvrit de grands yeux. « Comme… une lampe de poche » Zoé sourit. « Exactement. Une lampe de poche très intelligente. »

Nougat ronronna doucement. « Tu vois, Lila, ce n’est pas un examen qui fait peur. C’est juste un moment où ton corps devient un paysage de lumière. »

Opaline ajouta, d’une voix douce : « Et nous serons là, tout près. »

La petite fille inspira profondément, puis suivit Zoé dans la salle de radiographie.

La pièce était calme, baignée d’une lumière douce. Au centre, une grande table blanche attendait, comme un nuage posé au sol. Au-dessus, un appareil suspendu ressemblait à un gros appareil photo, mais sans flash, sans bruit agressif.

Zoé montra la table. « Tu vas t’allonger ici, comme si tu faisais une petite sieste. »

Lila grimpa, un peu hésitante. Nougat sauta à côté d’elle, s’installant près de son bras. Opaline se posa au pied de la table, ses yeux bleus brillants comme deux lanternes.

« Est-ce que ça va faire mal » demanda Lila. Zoé secoua la tête. « Pas du tout. Tu ne sentiras rien. C’est juste de la lumière. Une lumière qui traverse ton corps comme le soleil traverse une fenêtre. »

Lila sembla réfléchir. « Alors… c’est comme si je devenais transparente » « Oui », répondit Zoé. « Mais seulement pour la machine. Pas pour nous. »

Nougat gloussa doucement. « Moi, je te vois très bien. Et je te trouve très courageuse. »

Opaline posa une patte sur la main de Lila. « Tu vas voir, c’est très rapide. Comme un clignement d’étoile. »

Zoé ajusta l’appareil au-dessus de la petite fille. « Je vais juste te demander de rester immobile quelques secondes. Comme une statue de lumière. »

Lila inspira profondément. Nougat posa sa tête contre son bras. Opaline ferma les yeux, comme pour lui transmettre du calme.

Zoé recula derrière une vitre transparente. « Prête » Lila hocha la tête.

Un léger clic résonna. Pas un bruit fort. Pas un bruit qui surprend. Juste un petit souffle mécanique, comme si la machine prenait une inspiration.

Et c’était fini.

Zoé revint aussitôt, souriante. « Tu vois, Lila C’était très rapide. Tu as été parfaite. »

Lila se redressa, étonnée. « C’est déjà fini » « Oui. La radiographie, c’est un peu comme un clin d’œil de lumière. »

Nougat bondit sur ses pattes. « Tu as été incroyable » Opaline ajouta : « Et maintenant, tu sais ce que c’est. Tu pourras le dire aux autres enfants. »

Lila sourit, fière. « C’était pas si terrible. En fait… c’était même un peu magique. »

Zoé hocha la tête. « La lumière peut être magique quand elle nous aide à comprendre ce qui se passe dans le corps. Grâce à elle, les médecins peuvent voir si tout va bien, ou comment aider quand quelque chose ne va pas. »

Lila regarda l’appareil, puis les deux chats. « Vous croyez que… le miroir vous a amenés ici pour m’aider » Nougat et Opaline échangèrent un regard complice.

« Peut-être », répondit Nougat. « Ou peut-être que nous sommes là pour tous les enfants qui ont un peu peur. »

Opaline ajouta, d’une voix douce : « Et pour leur montrer que la lumière n’est jamais un ennemi. Elle éclaire, elle rassure, elle révèle. »

Lila descendit de la table, sa peluche dans les bras. « Je me sens plus courageuse maintenant. »

Nougat ronronna. « Le courage, c’est comme une petite flamme. Parfois, il suffit d’un souffle pour l’allumer. »

Opaline sourit. « Et tu viens d’allumer la tienne. »

La petite fille les serra tous les deux dans ses bras. « Merci. »

Puis elle s’éloigna avec Zoé, légère, presque dansante.

Les deux chats restèrent un moment dans la salle silencieuse. Le miroir des étoiles avait commencé son œuvre. Et ils savaient que d’autres aventures les attendaient.


Chapitre 3 — Le Chant des Ondes Invisibles

Après avoir accompagné Lila pour sa radiographie, Nougat et Opaline se retrouvèrent de nouveau dans le long couloir blanc. Mais cette fois, quelque chose avait changé. L’air vibrait légèrement, comme si une musique très douce, presque imperceptible, flottait autour d’eux.

Nougat dressa les oreilles. « Tu entends ça, Opaline » La chatte blanche ferma les yeux un instant. « Oui… c’est comme une chanson que personne ne chante, mais que tout le monde peut sentir. »

Ils avancèrent, guidés par cette vibration mystérieuse. Les murs semblaient pulser doucement, comme si le bâtiment lui-même respirait. Au détour d’un couloir, ils aperçurent une petite porte décorée de dessins d’animaux marins : baleines, dauphins, poissons aux couleurs vives.

« On dirait une porte qui mène sous la mer », murmura Nougat.

Opaline hocha la tête. « Et l’échographie… c’est un peu ça. Un voyage dans un monde d’ondes, comme celles que les dauphins utilisent pour se parler. »

La porte s’ouvrit doucement. Une femme aux cheveux argentés, attachés en un chignon souple, les accueillit avec un sourire lumineux. Elle portait une blouse turquoise, comme la surface d’un lagon.

« Bonjour, mes petits explorateurs. Je m’appelle Maëlle. Je fais passer les échographies. »

Nougat s’inclina légèrement, comme un chat très poli. Opaline, elle, sentit immédiatement la douceur de cette femme. Une douceur qui enveloppait tout.

« L’échographie », expliqua Maëlle, « c’est un examen qui utilise des ondes. Pas des ondes qui font peur. Des ondes qui ressemblent à des caresses. Elles voyagent dans le corps et reviennent avec des images. Comme un écho. »

Nougat ouvrit de grands yeux. « Comme quand on miaule dans une grotte et que le son revient » « Exactement », répondit Maëlle.

À ce moment-là, un petit garçon entra dans la pièce. Il avait des cheveux noirs en bataille et un regard inquiet. Il tenait un petit bateau en bois contre sa poitrine.

« Bonjour, toi », dit Maëlle. « Tu dois être Tom. Tu viens pour ton échographie du ventre. »

Tom hocha la tête, sans parler. Ses doigts serraient son bateau si fort que ses jointures blanchissaient.

Opaline s’approcha doucement. « Tu aimes la mer » Tom leva les yeux vers elle, surpris qu’un chat puisse parler. « Oui… beaucoup. Mais j’ai un peu mal au ventre. Et j’ai peur de ce qu’on va me faire. »

Nougat sauta sur une chaise pour être à sa hauteur. « On ne va rien te faire de méchant. L’échographie, c’est comme si ton ventre devenait un petit océan. Et la machine écoute les vagues. »

Tom cligna des yeux. « Elle écoute… les vagues » « Oui », répondit Opaline. « Et elle les transforme en images. »

Maëlle invita Tom à s’allonger sur la table. La pièce était douce, presque tamisée. Une grande machine reposait à côté, avec un écran noir pour l’instant. Sur une petite étagère, un flacon de gel transparent brillait comme une goutte de rosée.

« Je vais mettre un peu de gel sur ton ventre », expliqua Maëlle. « Il est un peu froid, mais il ne fait pas mal. Il sert juste à aider les ondes à voyager. »

Tom inspira profondément. Quand le gel toucha sa peau, il sursauta un peu, puis rit. « C’est glacé » « Comme l’eau au bord de la mer le matin », dit Nougat.

Maëlle prit une petite sonde, un objet arrondi, lisse, qui ressemblait à un galet blanc. « Ça, c’est la sonde. Elle envoie les ondes et les reçoit. Comme un dauphin qui écoute. »

Elle la posa délicatement sur le ventre de Tom. L’écran s’illumina aussitôt.

Des formes apparurent. Des ombres. Des lumières. Des mouvements doux, comme des vagues qui se replient.

Tom ouvrit la bouche, émerveillé. « C’est… c’est moi, ça » « Oui », répondit Maëlle. « C’est ton ventre. Tes organes. Ils bougent, ils vivent, ils travaillent pour toi. »

Nougat s’approcha de l’écran. « On dirait un paysage secret. » Opaline ajouta : « Un monde que personne ne voit, mais qui existe pourtant. »

Tom regardait, fasciné. « Ça ne fait pas mal du tout. Je sens juste… comme une caresse. »

Maëlle sourit. « C’est exactement ça. L’échographie, c’est un examen tout en douceur. Pas de piqûre, pas de lumière forte, pas de bruit. Juste des ondes qui voyagent. »

Tom sembla réfléchir. « Alors… c’est comme si mon ventre parlait » « Oui », répondit Opaline. « Et la machine écoute. »

Le petit garçon se détendit complètement. Son bateau glissa de sa main, et Nougat le rattrapa avec sa patte, fier comme un acrobate.

Quand l’examen fut terminé, Maëlle essuya le gel avec une serviette chaude. Tom se redressa, un sourire timide aux lèvres.

« C’était… presque agréable », dit-il. « La mer intérieure est toujours paisible », murmura Opaline.

Tom serra son bateau contre lui. « Merci. Je n’ai plus peur maintenant. »

Nougat ronronna. « Le courage, c’est comme une vague. Parfois, il suffit d’un souffle pour la faire grandir. »

Tom leur fit un petit signe de la main avant de sortir. Maëlle caressa doucement la tête d’Opaline. « Vous êtes de merveilleux guides. Les enfants ont besoin de vous. »

Les deux chats échangèrent un regard. Ils sentaient que leur mission n’était pas terminée. Le miroir des étoiles les avait amenés ici pour une raison. Et d’autres enfants les attendaient.

Opaline murmura : « Le prochain voyage sera différent. Plus profond. Plus mystérieux. »

Nougat hocha la tête. « Le scanner… c’est ça, n’est-ce pas » « Oui », répondit-elle. « Un tunnel de lumière. Un anneau qui voit tout. »

Ils quittèrent la salle, portés par une nouvelle vibration. Leur aventure continuait.


Chapitre 4 — Le Portail des Anneaux de Lumière

Le couloir semblait s’être transformé. Les murs, d’ordinaire blancs et lisses, vibraient maintenant d’une lueur dorée, comme si le soleil s’était glissé à l’intérieur du bâtiment. Nougat et Opaline marchaient côte à côte, leurs ombres s’étirant doucement derrière eux.

« Tu sens ça » murmura Nougat. Opaline hocha la tête. « Oui. C’est une lumière différente. Plus profonde. Comme un appel venu de très loin. »

Ils avancèrent encore, guidés par cette sensation étrange. Au bout du couloir, une grande porte circulaire se dressait, décorée de motifs en spirale. On aurait dit une porte de temple ancien, ou l’entrée d’un monde secret.

Quand elle s’ouvrit, une femme en blouse blanche apparut. Elle avait des cheveux bruns attachés en queue-de-cheval, et un sourire calme, presque méditatif.

« Bonjour, vous deux. Je suis Amina. Je m’occupe du scanner. »

Nougat inclina la tête. Opaline sentit immédiatement la douceur de cette femme, une douceur solide, comme une pierre chaude au soleil.

« Le scanner », expliqua Amina, « c’est un examen qui utilise un anneau de lumière pour regarder l’intérieur du corps. Pas pour faire mal. Pas pour toucher. Juste pour observer, comme un œil bienveillant. »

À ce moment-là, un garçon entra dans la pièce. Il avait une dizaine d’années, les cheveux blonds en bataille, et un sweat bleu trop grand pour lui. Ses yeux étaient grands ouverts, un peu inquiets.

« Bonjour, toi », dit Amina. « Tu dois être Éloi. Tu viens pour ton scanner du thorax. »

Éloi hocha la tête, sans parler. Il regarda la grande machine au centre de la pièce : un anneau immense, blanc, silencieux, avec une table qui glissait doucement à l’intérieur.

« On dirait… un tunnel », murmura-t-il. « Ou un portail », répondit Nougat. « Un portail vers les étoiles », ajouta Opaline.

Éloi les observa, surpris qu’ils puissent parler, mais rassuré par leur présence. « J’ai un peu peur. C’est grand. Et… ça fait du bruit, non »

Opaline s’approcha de lui, sa queue effleurant sa jambe. « Oui, ça fait un peu de bruit. Mais pas un bruit méchant. Plutôt comme un tambour qui bat doucement. Un cœur de lumière. »

Nougat ajouta : « Et tu ne seras jamais enfermé. L’anneau est ouvert. Tu peux sortir quand tu veux. »

Amina sourit. « Exactement. Le scanner ne ferme jamais autour de toi. Il t’entoure, mais il ne t’enferme pas. »

Éloi inspira profondément. « D’accord… je vais essayer. »

La salle du scanner était vaste, lumineuse, presque futuriste. L’anneau brillait d’une lumière blanche très douce, comme un halo. La table semblait flotter légèrement, prête à accueillir un voyageur.

« Tu vas t’allonger ici », dit Amina. « Comme si tu montais sur un lit magique. »

Éloi s’installa, un peu raide. Nougat sauta sur la table, juste à côté de sa tête. Opaline se posta près de ses pieds, ses yeux bleus brillants comme deux étoiles.

« Je vais attacher une petite sangle pour que tu restes bien immobile », expliqua Amina. « Ce n’est pas pour te coincer. C’est juste pour que les images soient très nettes. »

Éloi hocha la tête. « Je comprends. »

Amina recula vers une petite cabine vitrée. « Je vais te parler tout le long. Tu m’entendras très bien. Et si tu as besoin, tu lèves la main. Je suis là. »

La table commença à avancer doucement. Éloi entra dans l’anneau.

Le bruit commença. Un voum… voum… voum régulier, comme un tambour lointain. Puis un tic-tic-tic rapide, comme des petites étoiles qui s’allument.

Éloi serra les poings. « Ça fait un peu peur… »

Nougat posa sa patte sur son bras. « Écoute-le comme une musique. Une musique de l’espace. »

Opaline murmura : « Ce bruit, c’est la machine qui regarde. Elle ne touche pas. Elle ne fait pas mal. Elle observe, comme un astronome regarde les constellations. »

Éloi respira plus calmement. « On dirait… un vaisseau spatial. »

« C’en est un », répondit Nougat. « Un vaisseau qui explore ton corps comme on explore une galaxie. »

Sur l’écran de contrôle, des images apparaissaient : des coupes du thorax, des formes, des ombres, des lumières. Amina observait attentivement, concentrée mais sereine.

« Tout va bien », dit-elle dans le micro. « Tu es très courageux. »

Éloi sourit faiblement. « Ça ne fait pas mal du tout. C’est juste… impressionnant. »

« Les choses impressionnantes ne sont pas toujours dangereuses », murmura Opaline. « Parfois, elles sont juste grandes. Comme les montagnes. Comme les océans. Comme les anneaux de lumière. »

Le bruit continua encore quelques instants. Puis il s’arrêta. La table recula doucement.

Amina revint, souriante. « C’est terminé. Tu as été formidable. »

Éloi se redressa, surpris. « Déjà » « Oui », répondit Amina. « Le scanner est rapide. Il regarde très vite. »

Nougat sauta de la table. « Tu vois, tu as traversé un portail de lumière. »

Opaline ajouta : « Et tu en es ressorti plus fort. »

Éloi sourit, un vrai sourire cette fois. « Merci… je n’ai plus peur maintenant. »

Amina posa une main douce sur son épaule. « Tu peux être fier de toi. »

Le garçon sortit de la salle, son pas plus léger qu’à l’entrée.

Les deux chats restèrent un moment silencieux, observant l’anneau immobile. Il semblait les regarder lui aussi, comme un œil géant, paisible et bienveillant.

« Le prochain voyage sera encore différent », murmura Opaline. « Oui », répondit Nougat. « L’IRM… un monde de sons, de rythmes, de vibrations. »

Ils quittèrent la salle, prêts pour la suite.


Chapitre 5 — La Symphonie des Aimants

Le couloir s’était fait plus silencieux encore, comme si le monde retenait son souffle. Nougat et Opaline marchaient côte à côte, leurs pas feutrés résonnant à peine sur le sol brillant. Une sensation nouvelle flottait dans l’air : une vibration profonde, presque imperceptible, comme un murmure venu du cœur de la Terre.

Nougat frissonna légèrement. « Ce n’est pas comme la lumière du scanner… » Opaline hocha la tête. « Non. C’est un autre langage. Un langage de sons. De rythmes. De battements. »

Ils avancèrent jusqu’à une grande salle dont la porte était décorée de formes géométriques : cercles, spirales, lignes ondulées. On aurait dit des dessins d’ondes, des vibrations figées dans le temps.

La porte s’ouvrit doucement. Une femme en blouse violette apparut. Elle avait des cheveux noirs très longs, attachés en tresse, et un regard calme, profond, presque méditatif.

« Bonjour, mes petits compagnons. Je suis Hanaé. Je m’occupe de l’IRM. »

Nougat inclina la tête. Opaline sentit immédiatement la sérénité de cette femme, une sérénité qui enveloppait tout autour d’elle comme un manteau chaud.

« L’IRM », expliqua Hanaé, « c’est un examen qui utilise un grand aimant pour regarder l’intérieur du corps. Pas un aimant qui attire les objets. Un aimant très spécial, qui écoute les atomes. »

Nougat ouvrit de grands yeux. « Les atomes… parlent » « Oui », répondit Hanaé. « Ils chantent, même. Et la machine transforme leur chant en images. »

À ce moment-là, une petite fille entra dans la pièce. Elle avait des cheveux blonds très clairs, presque blancs, et un regard doux mais inquiet. Elle tenait un petit casque audio rose dans ses mains.

« Bonjour, toi », dit Hanaé. « Tu dois être Émy. Tu viens pour ton IRM du cerveau. »

Émy hocha la tête, serrant son casque contre elle. « J’ai un peu peur… On m’a dit que ça faisait beaucoup de bruit. »

Opaline s’approcha doucement. « Oui, ça fait du bruit. Mais pas un bruit dangereux. Plutôt comme… une grande batterie qui joue pour toi. »

Nougat ajouta : « Et tu ne seras jamais seule. Nous serons là. Et Hanaé aussi. »

La petite fille inspira profondément. « D’accord… je veux bien essayer. »

La salle de l’IRM était vaste, presque majestueuse. Au centre, une immense machine blanche se dressait, avec un tunnel large et lumineux. On aurait dit une grotte de neige, ou un passage vers un autre monde.

Émy s’arrêta un instant, impressionnée. « C’est… très grand. »

Hanaé posa une main douce sur son épaule. « Oui. Mais ce n’est pas un tunnel qui enferme. C’est un tunnel qui écoute. »

Nougat sauta sur la table, comme pour montrer l’exemple. « Regarde, ce n’est qu’un lit qui glisse. Rien de plus. »

Opaline se posta près de la tête d’Émy. « Et tu auras ton casque. Tu pourras écouter de la musique. »

Émy hocha la tête, rassurée. « Je peux mettre ma chanson préférée » « Bien sûr », répondit Hanaé. « Tu peux même fermer les yeux et imaginer que tu es dans un concert. »

La petite fille s’allongea sur la table. Hanaé plaça un coussin sous sa tête, puis lui donna son casque. « Je vais te mettre de la musique douce. Et je te parlerai tout le long. »

Émy mit son casque. Nougat posa sa patte sur sa main. Opaline ronronna doucement, un ronronnement profond, presque hypnotique.

La table commença à avancer. Émy entra dans le tunnel.

Le bruit commença aussitôt. Un BOUM-BOUM-BOUM régulier, puissant, comme un tambour géant. Puis un TAC-TAC-TAC rapide, comme des marteaux minuscules. Puis un VOUUUUM long, grave, enveloppant.

Émy serra les yeux. « C’est fort… »

La voix de Hanaé résonna dans son casque. « Oui, c’est fort. Mais ce n’est pas un bruit dangereux. C’est la machine qui travaille. Elle écoute ton corps. Elle écoute ton cerveau. Elle écoute tes pensées qui bougent. »

Nougat murmura : « Imagine que tu es dans un train magique. Un train qui traverse les nuages. »

Opaline ajouta : « Ou dans une grotte où les géants jouent de la musique. »

Émy respira plus calmement. « On dirait… des tambours. »

« Oui », répondit Nougat. « Des tambours de lumière. »

Sur l’écran de contrôle, des images apparaissaient : des coupes du cerveau, des formes délicates, des lignes, des courbes. Hanaé observait avec attention, concentrée mais sereine.

« Tout va bien », dit-elle dans le micro. « Tu es très courageuse. »

Émy sourit faiblement. « Je n’ai plus peur. C’est juste… bruyant. »

Opaline ronronna. « Le bruit n’est pas toujours un ennemi. Parfois, il est juste là pour dire : “Je travaille pour toi.” »

Le bruit continua encore quelques minutes. Puis il s’arrêta. La table recula doucement.

Hanaé revint, souriante. « C’est terminé. Tu as été merveilleuse. »

Émy se redressa, étonnée. « Déjà » « Oui », répondit Hanaé. « L’IRM prend un peu de temps, mais tu as été très calme. »

Nougat sauta de la table. « Tu as traversé la symphonie des aimants. »

Opaline ajouta : « Et tu en es ressortie plus forte. »

Émy sourit, un vrai sourire, lumineux. « Merci… je n’ai plus peur maintenant. »

Hanaé posa une main douce sur sa joue. « Tu peux être fière de toi. »

La petite fille sortit de la salle, son casque rose autour du cou, légère comme une plume.

Les deux chats restèrent un moment silencieux, observant le tunnel immobile. Il semblait encore vibrer, comme s’il gardait en lui la musique des aimants.

« Nous avons appris beaucoup », murmura Nougat. « Oui », répondit Opaline. « Mais le miroir des étoiles n’a pas fini de nous guider. »

Ils quittèrent la salle, prêts pour la suite de leur mission.


Chapitre 6 — Là où les Images Parlent

Quand Nougat et Opaline quittèrent la salle de l’IRM, ils sentirent quelque chose de différent dans l’air. Comme si le bâtiment lui-même les guidait vers un lieu plus calme, plus secret, un lieu où les histoires se rassemblent pour devenir des réponses.

Le couloir s’assombrit légèrement, mais pas d’une obscurité inquiétante. Plutôt une pénombre douce, comme celle d’une bibliothèque où l’on chuchote pour ne pas déranger les pensées.

« Tu sens ça » murmura Nougat. Opaline hocha la tête. « Oui. C’est un endroit où l’on réfléchit. Où l’on observe. Où l’on comprend. »

Ils avancèrent jusqu’à une porte en verre dépoli. Sur la vitre, on pouvait lire : Salle d’interprétation — Radiologues.

Nougat pencha la tête. « Radiologues… ce sont eux qui lisent les images, n’est-ce pas » Opaline sourit. « Oui. Ce sont les conteurs du corps. Ceux qui savent écouter ce que les images veulent dire. »

La porte s’ouvrit doucement. Une femme aux cheveux gris courts, aux yeux doux et très attentifs, les accueillit. Elle portait une blouse blanche et un collier en forme de petite étoile.

« Bonjour, vous deux. Je suis le docteur Solange. Radiologue. Entrez, je vous attendais. »

Nougat et Opaline échangèrent un regard surpris. « Vous… saviez que nous allions venir » demanda Nougat. Solange sourit. « Quand deux chats apparaissent dans un service de radiologie et aident les enfants à ne plus avoir peur, on finit par entendre parler d’eux. »

Elle les invita à entrer.

La salle était silencieuse, éclairée par la lueur bleutée de plusieurs écrans géants. Sur ces écrans, des images défilaient : des radiographies, des échographies, des scanners, des IRM. Des silhouettes, des ombres, des lumières, des formes mystérieuses.

Nougat s’approcha d’un écran. « C’est… le thorax d’Éloi » « Oui », répondit Solange. « Et grâce à ces images, je peux voir comment il respire, comment son cœur bat, comment ses poumons travaillent. »

Opaline s’assit, fascinée. « Les images… parlent vraiment. »

Solange hocha la tête. « Elles ne parlent pas avec des mots. Elles parlent avec des signes. Avec des nuances. Avec des détails minuscules. Et mon travail, c’est de les écouter. »

Elle montra une radiographie. « Ici, par exemple, je peux voir si un os est cassé. » Puis une échographie. « Là, je peux voir comment un organe bouge. » Puis un scanner. « Ici, je peux voir des choses très précises, comme si je regardais à travers des couches. » Puis une IRM. « Et là, je peux voir les tissus, les muscles, le cerveau… comme une carte très détaillée. »

Nougat cligna des yeux. « C’est comme si chaque examen racontait une partie de l’histoire. » « Exactement », répondit Solange. « Et moi, je rassemble les morceaux. »

Elle s’assit devant un écran où apparaissait l’image du ventre de Tom. « Tu vois cette forme-là » Nougat plissa les yeux. « On dirait… une petite vague. » Solange sourit. « C’est son estomac. Il fonctionne très bien. »

Opaline s’approcha. « Et ça, c’est quoi » « Son foie. Il est en pleine forme. »

Les deux chats se regardèrent, émus. Ils comprenaient enfin. Les examens n’étaient pas là pour faire peur. Ils étaient là pour rassurer. Pour comprendre. Pour soigner.

Solange continua : « Quand un enfant passe un examen, il ne voit que la machine. Il entend le bruit, il ressent l’inconnu. Mais derrière tout ça, il y a nous. Des médecins qui regardent les images avec attention, avec patience, avec bienveillance. »

Elle posa une main sur son cœur. « Nous ne cherchons pas ce qui va mal. Nous cherchons comment aider. »

Nougat sentit une chaleur dans sa poitrine. « C’est beau… » Opaline murmura : « C’est comme si chaque image était une étoile. Et vous, vous les reliez pour former une constellation. »

Solange sourit, touchée. « C’est exactement ça. Une constellation de santé. »

Elle se leva et les conduisit vers une grande baie vitrée. Dehors, le soleil se couchait, teintant le ciel de rose et d’or.

« Vous savez », dit-elle, « les enfants ont souvent peur parce qu’ils ne savent pas ce qui se passe. Mais grâce à vous, ils comprennent. Ils voient que la lumière, les sons, les machines… tout cela n’est pas là pour leur faire du mal. »

Opaline posa sa tête contre la main de Solange. « Nous voulons juste qu’ils se sentent en sécurité. »

Solange caressa doucement la chatte blanche. « Et vous y arrivez très bien. »

Nougat regarda le ciel. « Le miroir des étoiles nous a amenés ici pour une raison. » « Oui », répondit Solange. « Et votre mission n’est pas terminée. »

Opaline sentit une vibration familière. « Le miroir nous appelle… encore. »

Solange sourit.


Chapitre 7 — Le Puzzle du Courage

Le service de radiologie semblait plus calme que d’habitude. Les lumières étaient tamisées, les couloirs baignés d’une douceur presque ouatée. Nougat et Opaline marchaient lentement, comme s’ils savaient que quelque chose d’important les attendait.

« Tu sens cette atmosphère » murmura Nougat. Opaline hocha la tête. « Oui. C’est comme si le silence retenait son souffle. Quelqu’un a besoin de nous. »

Ils avancèrent jusqu’à une petite salle d’attente décorée de dessins d’enfants. Sur les murs, des soleils, des arcs-en-ciel, des animaux souriants. Sur les chaises, des peluches déposées là pour rassurer.

Et au centre de la pièce, un garçon était assis, les épaules rentrées, les mains serrées autour d’un petit robot en plastique. Il avait une dizaine d’années, les cheveux châtains, le regard sombre et inquiet.

Nougat s’approcha doucement. « Bonjour… tu t’appelles comment » Le garçon leva les yeux, surpris qu’un chat lui parle. « Je… je m’appelle Malo. »

Opaline s’assit près de lui, sa queue enroulée autour de ses pattes. « Tu as l’air préoccupé. »

Malo inspira profondément. « Je dois faire… plusieurs examens. Une radio, un scanner… et peut-être une échographie. Tout ça dans la même journée. C’est beaucoup. Trop. »

Nougat posa une patte sur son genou. « C’est vrai que ça fait beaucoup. Mais tu n’es pas seul. »

Malo serra son robot contre lui. « J’ai peur qu’ils trouvent quelque chose de grave. J’ai peur de ne pas être assez courageux. J’ai peur de… tout. »

Opaline se rapprocha encore, sa voix douce comme un souffle. « Tu sais, Malo… le courage, ce n’est pas l’absence de peur. C’est avancer même quand on a peur. Et tu es déjà en train de le faire. »

Le garçon baissa les yeux. « Mais pourquoi autant d’examens » Nougat répondit : « Parce que ton corps est comme un grand puzzle. Et chaque examen montre une pièce différente. »

Opaline ajouta : « La radiographie montre les os. L’échographie montre les organes qui bougent. Le scanner montre les couches du corps, comme un livre ouvert. L’IRM montre les tissus, les muscles, le cerveau… comme une carte très détaillée. »

Malo releva la tête. « Alors… ils ont besoin de toutes les pièces pour comprendre » « Exactement », dit Nougat. « Et toi, tu leur donnes ces pièces. »

À ce moment-là, une infirmière entra dans la salle. Elle avait un sourire doux et des yeux pleins de bienveillance.

« Bonjour Malo. Je suis Léonie. Je vais t’accompagner pour tes examens. »

Malo se leva, un peu tremblant. « Je… je ne sais pas si je peux. »

Nougat sauta sur son épaule. « Tu peux. Et nous serons là. »

Opaline marcha à ses côtés. « Chaque examen est une étape. Et tu vas les franchir une par une. »

La radiographie — La première pièce du puzzle

Léonie conduisit Malo dans une salle lumineuse. « On va commencer par la radiographie. C’est rapide. »

Malo s’allongea sur la table. Nougat se posa près de sa tête. Opaline ronronna doucement.

Le clic de la machine résonna. Malo sursauta un peu, puis se détendit.

« C’est tout » dit Léonie. « Déjà » « Oui. Une pièce du puzzle de trouvée. »

Malo sourit timidement.

L’échographie — Le monde qui bouge

La salle suivante était douce, presque marine. Maëlle, la manipulatrice, les accueillit avec son sourire lumineux.

« On va regarder ton ventre, Malo. Comme un petit océan intérieur. »

Le gel froid le fit rire. La sonde glissa doucement. L’écran s’illumina.

« On dirait… des vagues », murmura Malo. « C’est ton corps qui vit », répondit Opaline.

Une deuxième pièce du puzzle venait de se poser.

Le scanner — Le portail de lumière

Amina les attendait dans la salle du scanner. « Tu vas entrer dans l’anneau. Il fait un peu de bruit, mais il ne touche jamais. »

Malo inspira profondément. « Je vais essayer. »

La table glissa doucement. Le voum-voum-voum régulier résonna.

Malo serra son robot. Nougat posa sa patte sur sa main. Opaline murmura : « Tu traverses un portail. Tu es en sécurité. »

Quand la table ressortit, Malo souriait. « C’était… impressionnant. Mais pas méchant. »

Troisième pièce du puzzle.

L’IRM — La symphonie intérieure

La dernière salle était vaste, presque sacrée. Hanaé les accueillit avec sa voix calme.

« Tu vas entendre des sons forts. Mais tu auras un casque. Et je te parlerai. »

Malo s’allongea. La table avança. Les tambours de l’IRM commencèrent.

BOUM-BOUM-BOUM TAC-TAC-TAC VOUUUUM

Malo ferma les yeux. « On dirait… une musique. »

« C’en est une », dit Opaline. « La musique de ton corps. »

Quand l’examen fut terminé, Malo se redressa, les yeux brillants.

« J’ai réussi… j’ai tout fait. »

Léonie sourit. « Oui. Et grâce à toi, les médecins auront toutes les pièces du puzzle. »

Malo regarda Nougat et Opaline. « Merci… je n’aurais jamais pu sans vous. »

Nougat ronronna. « Tu avais tout en toi. Nous n’avons fait que marcher à tes côtés. »

Opaline ajouta : « Tu es plus courageux que tu ne le crois. »

Malo serra son robot contre lui. « Je crois… que j’ai moins peur maintenant. »

Les deux chats échangèrent un regard. Le miroir des étoiles brillait quelque part, invisible mais présent.

Ils avaient aidé un autre enfant. Et leur mission continuait.

« Alors allez. Les étoiles vous attendent. »


Chapitre 8 — Le Ballet Invisible du Service

Le miroir des étoiles n’avait pas brillé cette fois. Pas de lumière mystérieuse, pas de vibration étrange. Juste un silence doux, presque feutré, comme si le service de radiologie retenait son souffle avant de révéler un secret.

Nougat et Opaline marchaient côte à côte, leurs pas glissant sur le sol brillant. Ils connaissaient maintenant les salles, les machines, les bruits, les lumières. Mais il restait un endroit qu’ils n’avaient jamais exploré : l’envers du décor.

« On dirait que tout dort », murmura Nougat. « Non », répondit Opaline. « Tout travaille en silence. »

Ils s’arrêtèrent devant une porte entrouverte. Une lumière chaude s’en échappait, accompagnée d’un murmure de voix humaines. Pas des voix inquiètes, ni pressées. Des voix concentrées, posées, presque musicales.

Nougat poussa la porte du bout de la patte.

La salle des écrans vivants

La pièce était vaste, tapissée d’écrans de toutes tailles. Certains affichaient des images en noir et blanc, d’autres des couleurs douces, d’autres encore des formes étranges, presque abstraites. Des silhouettes humaines se tenaient devant ces écrans, chacune plongée dans une tâche précise.

Une femme aux cheveux courts, vêtue d’une blouse bleu nuit, leva les yeux et sourit.

« Ah… les deux petits guides. Entrez. Je suis Éliane, la coordinatrice du service. »

Nougat s’approcha, intrigué. « Que faites-vous ici » Éliane répondit sans hésiter : « Nous faisons circuler les images. Nous les envoyons aux médecins, aux infirmières, aux chirurgiens. Nous vérifions que tout arrive au bon endroit, au bon moment. »

Opaline observa les écrans. « C’est comme… un carrefour. » « Exactement », dit Éliane. « Un carrefour où chaque image trouve sa route. »

Un homme à lunettes, assis devant un ordinateur, se tourna vers eux. « Moi, je vérifie la qualité des images. Si quelque chose est flou, je le signale. Pas pour embêter, mais pour être sûr que les médecins voient tout. »

Une jeune femme aux cheveux bouclés ajouta : « Et moi, je m’occupe des dossiers. Je m’assure que chaque enfant est attendu, que son nom est bien écrit, que son examen est prêt. »

Nougat cligna des yeux. « Vous êtes comme… des gardiens invisibles. » « Oui », répondit Éliane. « Nous sommes ceux qu’on ne voit pas, mais sans nous, rien ne circule. »

Le couloir des préparations

Éliane les guida vers un autre espace. Un long couloir où des chariots étaient alignés, remplis de draps propres, de gel d’échographie, de protections en mousse, de casques audio, de petites couvertures colorées.

« Ici », expliqua-t-elle, « c’est le lieu où l’on prépare tout pour que les enfants se sentent bien. »

Une aide-soignante repliait une couverture jaune. « Celle-ci est pour les plus petits. Elle sent la vanille. Ça les rassure. »

Un autre soignant rangeait des casques audio. « On choisit la musique avec eux. Certains veulent du classique, d’autres du rock, d’autres des berceuses. »

Opaline sourit. « Vous pensez à tout. » « On essaie », répondit l’aide-soignante. « Parce que la peur se cache dans les détails. Et le réconfort aussi. »

La salle des réunions silencieuses

Plus loin, une petite salle ronde accueillait plusieurs médecins. Ils parlaient doucement, penchés sur des images projetées sur un grand écran.

Le docteur Solange, qu’ils connaissaient déjà, leva la main pour les saluer.

« Ici, nous discutons ensemble. Nous croisons nos regards. Nous partageons nos doutes. Nous cherchons les meilleures solutions. »

Un jeune médecin ajouta : « Une image seule ne dit pas tout. Mais plusieurs regards sur la même image… ça change tout. »

Nougat s’assit, fasciné. « Vous travaillez comme une équipe de musiciens. Chacun joue sa note. » Solange sourit. « Oui. Et ensemble, nous composons une mélodie qui aide les enfants. »

Opaline observa les médecins. « Vous ne parlez pas fort. » « Parce que la concentration est fragile », répondit Solange. « Et parce que chaque image mérite du respect. »

Le retour au couloir

Quand ils ressortirent, Nougat et Opaline restèrent un moment silencieux.

« Je croyais que tout se passait dans les salles d’examen », dit Nougat. « Moi aussi », murmura Opaline. « Mais en réalité… tout continue après. Et avant. Et autour. »

Ils comprirent alors quelque chose d’essentiel : un examen n’est jamais un moment isolé. C’est un fil dans une grande toile. Et chaque personne du service tient un morceau de ce fil.

Éliane posa une main douce sur la tête de Nougat. « Vous voyez… ici, personne n’est seul. Ni les enfants. Ni les images. Ni nous. »

Opaline sentit une chaleur dans sa poitrine. « Le miroir des étoiles nous a montré les machines. Les enfants. Les images. Et maintenant… les humains qui veillent. »

Nougat hocha la tête. « C’est un ballet. Un ballet invisible. »

Ils quittèrent la salle, le cœur rempli d’une nouvelle compréhension.

Leur mission prenait une autre dimension.


Chapitre 9 — L’Enfant qui Fermait Toutes les Portes

Le service de radiologie semblait étrangement agité ce matin-là. Pas bruyant. Pas chaotique. Mais traversé par une tension légère, comme un fil trop tendu qui menace de vibrer.

Nougat et Opaline le sentirent immédiatement.

« Quelque chose cloche », murmura Nougat. Opaline hocha la tête. « Oui. Ce n’est pas la peur habituelle. C’est… un refus. Une porte fermée de l’intérieur. »

Ils avancèrent dans le couloir, guidés par une énergie qu’ils n’avaient encore jamais ressentie. Devant une petite salle d’attente, une infirmière se tenait, les bras croisés, l’air désemparé.

« Bonjour Léonie », dit Opaline. L’infirmière sursauta légèrement. « Oh… vous tombez bien. On a un souci. »

Elle désigna la salle d’attente d’un geste du menton. « Il y a un garçon qui refuse de passer son examen. Pas par peur de la machine. Pas par peur du bruit. Il refuse tout. Il ne veut pas entrer. Il ne veut pas parler. Il ne veut même pas nous regarder. »

Nougat pencha la tête. « Comment s’appelle-t-il » « Nils », répondit Léonie. « Il a huit ans. Et il a décidé que rien ni personne ne le ferait bouger. »

Opaline sentit une vibration étrange. « Ce n’est pas un enfant qui a peur. C’est un enfant qui se protège. »

Léonie soupira. « Si vous arrivez à l’approcher… ce serait un miracle. »

La forteresse silencieuse

Dans la salle d’attente, un petit garçon était assis dans un coin, les genoux ramenés contre sa poitrine. Il portait un sweat noir à capuche, trop grand pour lui. Sa capuche était tirée sur son visage, ne laissant voir qu’un menton serré et deux mains crispées.

Il ne bougeait pas. Il ne parlait pas. Il ne levait même pas la tête.

Nougat s’approcha doucement. Pas un bruit. Pas un mot.

Il s’assit à un mètre de Nils. Juste ça.

Opaline fit de même, de l’autre côté. Un triangle silencieux.

Pendant de longues minutes, rien ne se passa. Nils restait immobile, comme une pierre. Nougat et Opaline respiraient calmement, sans chercher à attirer son attention.

Puis, très lentement, Nils tourna la tête. Juste un peu. Ses yeux sombres se posèrent sur Nougat.

« Tu veux quoi », murmura-t-il, d’une voix cassée.

Nougat répondit simplement : « Rien. Je suis juste là. »

Nils fronça les sourcils. « Tout le monde veut quelque chose. »

Opaline parla à son tour, d’une voix douce mais ferme. « Pas nous. Nous ne voulons rien. Nous attendons. »

Le garçon les observa longuement. Puis il lâcha, presque agressif : « Je ne ferai pas l’examen. Vous pouvez tous partir. »

Nougat ne broncha pas. « D’accord. Tu ne le feras pas. »

Nils cligna des yeux, surpris. « Quoi » « Tu as dit que tu ne le ferais pas. Alors tu ne le feras pas. »

Opaline ajouta : « Mais tu peux nous dire pourquoi. Pas pour qu’on te convainque. Juste pour que tu n’aies pas à porter ça tout seul. »

Le garçon serra les poings. « Ça ne vous regarde pas. »

« Peut-être », dit Nougat. « Mais parfois, dire les choses à quelqu’un qui ne veut rien en retour… ça fait du bien. »

Un long silence suivit. Puis Nils murmura, presque inaudible : « Ma petite sœur… elle a fait un examen. Et après… elle est restée à l’hôpital. Longtemps. Très longtemps. »

Opaline sentit son cœur se serrer. « Tu as eu peur. » « Non », répondit Nils. « J’ai perdu confiance. Les machines… elles ont pris ma sœur. »

Nougat s’approcha d’un pas. « Les machines n’ont rien pris. Elles ont essayé d’aider. »

Nils secoua la tête. « Je ne veux pas qu’elles me prennent moi aussi. »

La clé invisible

Opaline s’assit juste devant lui. « Nils… tu n’es pas ta sœur. Et ton histoire n’est pas la sienne. »

Le garçon leva les yeux, pleins de larmes contenues. « Et si ça recommence » « Alors nous serons là », dit Nougat. « Et les médecins aussi », ajouta Opaline. « Et ta sœur voudrait que tu prennes soin de toi. »

Nils baissa la tête. « Je ne sais pas… »

Opaline posa doucement sa tête contre son genou. « Tu n’as pas besoin de savoir. Tu as juste besoin d’avancer un tout petit pas. Pas l’examen. Pas la machine. Juste… te lever. »

Nils resta immobile. Puis, lentement, il posa sa main sur la tête d’Opaline.

« Un pas… juste un », murmura-t-il.

Il se leva. Ses jambes tremblaient. Mais il se leva.

Nougat sourit. « Voilà. Tu viens d’ouvrir une porte. »

Nils inspira profondément. « Je veux bien… essayer. Mais seulement si vous venez avec moi. »

Opaline hocha la tête. « Nous ne te quitterons pas. »

Le choix

Léonie les attendait dans le couloir, stupéfaite. « Il… il a accepté » Nougat répondit : « Non. Il a choisi. Ce n’est pas pareil. »

Nils serra son robot contre lui. « Je veux juste… comprendre. Et ne pas être seul. »

Opaline posa une patte sur sa main. « Alors tu es prêt. »

Et ensemble, ils avancèrent vers la salle d’examen. Pas pour affronter une machine. Mais pour affronter une peur ancienne. Et la transformer.


Chapitre 10 — Le Miroir qui Respirait

Depuis plusieurs jours, Nougat et Opaline arpentaient le service de radiologie comme deux gardiens silencieux. Ils avaient vu des enfants rire, trembler, se rassurer, se transformer. Ils avaient vu les machines chanter, vibrer, éclairer. Ils avaient vu les soignants travailler comme une grande famille invisible.

Mais ce matin-là, quelque chose était différent.

Très différent.

Le couloir semblait plus long que d’habitude. La lumière plus pâle. L’air plus dense, comme chargé d’une attente.

Nougat s’arrêta net. « Opaline… tu sens ça » La chatte blanche ferma les yeux. « Oui. Le miroir nous appelle. Mais… pas comme avant. »

Ils se dirigèrent vers le cabanon du jardin, celui où tout avait commencé. Le soleil n’était pas encore levé. La rosée brillait sur l’herbe comme des milliers de petites étoiles tombées du ciel.

Quand ils poussèrent la porte du cabanon, ils s’immobilisèrent.

Le miroir avait changé.

Un miroir vivant

Il ne reposait plus calmement sur son tabouret. Il vibrait. Littéralement.

Sa surface ondulait comme l’eau d’un lac sous le vent. Des filaments de lumière glissaient sur son cadre, comme des veines d’argent. Et surtout… Il respirait.

Pas comme un être humain. Pas comme un animal. Mais comme un objet qui s’éveille, qui s’étire, qui se prépare.

Nougat sentit son cœur battre plus vite. « Il… il est vivant » Opaline s’approcha, fascinée. « Non. Il n’est pas vivant. Il est… conscient. »

Le miroir émit une pulsation lumineuse. Une seule. Mais si forte que les deux chats reculèrent d’un pas.

Puis une voix résonna. Pas une voix humaine. Pas une voix animale. Une voix faite de lumière, de vibrations, de murmures.

« Nougat… Opaline… »

Les deux chats se figèrent.

« Vous avez appris. Vous avez observé. Vous avez accompagné. Vous avez compris. »

Nougat déglutit. « Compris quoi » La lumière du miroir s’intensifia.

« Que la peur n’est pas un ennemi. Que la lumière n’est pas une menace. Que les machines ne sont pas des monstres. Elles sont des portes. Des chemins. Des outils pour voir ce que les yeux ne voient pas. »

Opaline sentit une chaleur douce l’envelopper. « Pourquoi nous avoir choisis » Le miroir vibra.

« Parce que les enfants écoutent les cœurs qui ne jugent pas. Parce qu’ils font confiance à ceux qui ne mentent pas. Parce qu’ils comprennent la douceur avant les mots. Et vous êtes douceur. Vous êtes patience. Vous êtes lumière. »

Nougat sentit ses moustaches frémir. « Alors… notre mission est terminée » Le miroir pulsa une nouvelle fois.

« Non. Elle commence seulement. »

La vision

La surface du miroir devint soudain transparente. Pas comme un reflet. Pas comme une vitre. Comme une fenêtre ouverte sur un autre monde.

Les deux chats virent des enfants. Des dizaines. Des centaines. Certains riaient. D’autres pleuraient. D’autres attendaient, silencieux, dans des salles d’hôpital partout dans le monde.

Ils virent des machines. Des radiographies. Des échographes. Des scanners. Des IRM.

Ils virent des soignants. Des médecins. Des infirmières. Des manipulateurs. Des secrétaires. Des techniciens.

Tous reliés par un fil invisible.

« Vous voyez », murmura le miroir. « La radiologie n’est pas un lieu. C’est un langage. Un langage de lumière, de sons, d’ondes. Un langage pour comprendre. Pour soigner. Pour rassurer. »

Opaline sentit une larme glisser sur sa joue. « Et nous… que devons-nous faire » Le miroir répondit :

« Continuer. Raconter. Accompagner. Être les guides que les enfants n’ont pas toujours. Être les voix qui transforment la peur en curiosité. Être les étoiles qui éclairent les couloirs. »

Nougat s’approcha du miroir. « Mais… nous ne sommes que deux chats. »

La lumière devint douce, presque maternelle.

« Deux chats peuvent changer mille cœurs. Parce qu’ils parlent avec ce que les humains oublient parfois : la tendresse. »

Le cadeau du miroir

La surface du miroir se mit à briller d’un éclat nouveau. Puis deux petites lumières s’en détachèrent, flottant dans l’air comme des lucioles.

Elles se posèrent sur le front de Nougat et d’Opaline.

Une chaleur douce les traversa. Pas brûlante. Pas lourde. Juste… lumineuse.

« Je vous donne un don », dit le miroir. « Celui de voir les émotions cachées. Les peurs silencieuses. Les questions que les enfants n’osent pas poser. Et de leur répondre avec vérité. Avec douceur. Avec lumière. »

Nougat cligna des yeux. « Nous… nous pouvons vraiment faire ça » « Oui », répondit le miroir. « Parce que vous ne guérissez pas les corps. Vous guérissez les cœurs. »

Opaline sentit son cœur s’ouvrir comme une fleur. « Alors nous continuerons. Jusqu’à ce que chaque enfant sache que la lumière n’est pas un danger. »

Le miroir vibra une dernière fois. « Allez. Le monde vous attend. »

Les deux chats sortirent du cabanon. Le soleil se levait. Le ciel était rose, doré, immense.

Nougat inspira profondément. « Opaline… tu sens ça » La chatte blanche sourit.

« Oui. Le miroir nous a changés. Et maintenant… nous allons changer le monde. »

Ils avancèrent vers le service de radiologie. Leur mission venait de prendre une nouvelle dimension.


Chapitre 11 — Le Rire qui Tremblait

Le service de radiologie baignait dans une lumière dorée, presque joyeuse. Les couloirs semblaient plus vivants que d’habitude : des dessins d’enfants accrochés aux murs, des éclats de voix, des pas pressés mais légers. Pourtant, Nougat et Opaline sentaient une vibration étrange, comme une note dissonante dans une mélodie.

« Quelque chose cloche », murmura Nougat. Opaline hocha la tête. « Oui. Il y a un rire… mais un rire qui sonne faux. »

Ils avancèrent jusqu’à la salle d’attente principale. Là, un garçon d’environ neuf ans faisait le clown devant deux autres enfants. Il portait un t-shirt rouge avec un éclair jaune, des baskets lumineuses, et un sourire si large qu’il semblait peint.

« Regardez ! Je suis le plus rapide du monde ! » Il courut en rond, fit semblant de glisser, tomba volontairement, se releva en riant.

Les autres enfants riaient aussi. Mais Nougat, lui, sentit immédiatement que quelque chose n’allait pas.

Ce rire… Ce n’était pas un rire qui s’amuse. C’était un rire qui se protège.

Opaline s’approcha doucement. « Bonjour… tu t’appelles comment » Le garçon fit un salto maladroit et atterrit devant elle.

« Moi ? Je suis Félix ! Le super-héros du jour ! Rien ne m’arrête ! Pas même les machines ! »

Il riait encore. Mais ses yeux… Ses yeux brillaient d’une inquiétude qu’il tentait de cacher.

Nougat s’assit devant lui. « Tu viens pour un examen » Félix fit semblant de bomber le torse. « Oui ! Un scanner ! Trop facile ! Je vais entrer dans le tunnel comme un champion ! »

Il leva les bras comme un athlète. Les autres enfants applaudirent.

Mais Opaline, elle, vit la vérité. Elle vit la petite vibration dans les doigts de Félix. Elle vit la tension dans ses épaules. Elle vit la peur qui se cachait derrière le spectacle.

Elle s’approcha encore. « Tu sais… les super-héros ont le droit d’avoir peur. »

Félix éclata de rire. Un rire trop fort. Trop rapide.

« Moi ? Peur ? Jamais ! Je suis Félix-le-fantastique ! »

Il fit un geste grandiose… et son sourire se fissura une seconde. Une seule. Mais suffisante.

Nougat murmura : « Tu n’as pas besoin de jouer devant nous. »

Félix se figea. Son sourire disparut. Il regarda autour de lui, comme s’il cherchait une échappatoire.

« Je… je ne joue pas. Je suis juste… comme ça. »

Opaline posa doucement sa patte sur sa chaussure. « Tu peux être comme tu veux. Mais tu peux aussi être vrai. »

Félix baissa les yeux. Ses épaules s’affaissèrent. Et pour la première fois, il parla sans rire.

« J’ai peur du bruit. J’ai peur d’être coincé. J’ai peur de bouger. J’ai peur de… décevoir. »

Nougat s’approcha. « Décevoir qui » Félix serra les poings.

« Mes parents. Ils disent toujours que je suis courageux. Que je suis fort. Que je suis leur champion. Alors… je dois l’être. Même quand j’ai peur. »

Opaline sentit son cœur se serrer. « Être courageux, ce n’est pas ne jamais avoir peur. C’est dire la vérité. Même quand elle tremble. »

Félix releva la tête. Ses yeux étaient humides.

« Et si… je ne suis pas assez courageux » « Alors nous t’aiderons », répondit Nougat. « Et tu seras courageux quand même. »

Le chemin vers la vérité

Amina, la manipulatrice du scanner, arriva à ce moment-là. Elle sourit doucement.

« Félix ? On t’attend. Tu viens quand tu veux. »

Le garçon inspira profondément. « Je… je veux bien. Mais… je veux que les autres ne me voient pas. »

Amina hocha la tête. « Bien sûr. On peut passer par le petit couloir. »

Félix suivit Nougat et Opaline. Ses pas étaient plus lents, plus lourds. Mais ils étaient vrais.

Dans le couloir, il murmura : « Vous croyez que… je peux dire à mes parents que j’ai eu peur » Opaline répondit : « Tu peux leur dire que tu as été vrai. Et c’est encore plus fort. »

Le scanner, autrement

Dans la salle, Félix s’arrêta net. L’anneau blanc semblait immense.

« C’est… plus grand que ce que je pensais. »

Nougat sauta sur la table. « Viens. Je te montre. »

Félix posa sa main sur la table. Elle tremblait.

« Je… je ne sais pas si j’y arriverai. »

Opaline s’approcha. « Alors on va faire autrement. Tu vas t’allonger. Et tu vas fermer les yeux. Et tu vas imaginer que tu es dans une fusée. Une fusée qui fait du bruit quand elle décolle. Mais qui ne fait jamais mal. »

Félix hésita. Puis il s’allongea.

Amina plaça un casque sur ses oreilles. « Tu veux écouter quoi » « Le bruit de la mer », murmura-t-il.

La table avança doucement. Le scanner commença à vibrer.

VOUUUUM TAC-TAC-TAC BOUM-BOUM-BOUM

Félix serra les dents. Puis il entendit la mer. Les vagues. Le vent.

Et la voix de Nougat : « Tu es dans ta fusée. Elle décolle. Tu es en sécurité. »

Et la voix d’Opaline : « Tu n’es pas seul. Nous sommes là. »

Le bruit continua. Mais Félix respirait calmement. Très calmement.

Quand la table ressortit, il ouvrit les yeux. Ses joues étaient mouillées. Mais il souriait. Un vrai sourire. Pas un sourire peint.

« J’ai réussi… J’ai réussi sans faire semblant. »

Nougat ronronna. « C’est ça, le vrai courage. »

Opaline ajouta : « Et tu n’as déçu personne. Tu t’es juste trouvé. »

Félix se leva. Il semblait plus léger. Plus grand. Plus vrai.

« Merci… Merci de m’avoir vu. Pas le clown. Moi. »

Les deux chats échangèrent un regard. Leur don fonctionnait. Et il changeait des vies.

Quand Félix quitta la salle, le miroir des étoiles vibra quelque part, invisible mais présent.

Nougat murmura : « Le prochain enfant aura une autre peur. Une autre histoire. »

Opaline répondit : « Et nous serons prêts. »


Chapitre 12 — Le Dernier Passage du Miroir

Le soleil se couchait sur Brumeval, enveloppant le village d’une lumière rose et dorée. Nougat et Opaline marchaient côte à côte dans le jardin, leurs silhouettes s’allongeant sur l’herbe humide. Ils revenaient du service de radiologie, mais cette fois, quelque chose était différent.

Très différent.

Ils n’étaient plus seulement deux chats curieux. Ils n’étaient plus seulement deux guides. Ils étaient devenus les gardiens d’un savoir, d’une lumière, d’un lien invisible entre les enfants et les machines qui les effrayaient.

Et le miroir des étoiles les attendait.

Le miroir n’était plus le même

Quand ils poussèrent la porte du cabanon, ils s’arrêtèrent net.

Le miroir brillait. Pas comme avant. Pas comme un objet magique. Pas comme une fenêtre.

Il brillait comme un chemin.

Sa surface n’était plus lisse. Elle ondulait doucement, comme un tissu vivant. Des constellations minuscules apparaissaient et disparaissaient, comme si le ciel tout entier avait décidé de se poser là, dans ce petit cabanon oublié.

Nougat murmura : « Il… nous attend. »

Opaline hocha la tête. « Oui. Et il a quelque chose à nous dire. »

Ils s’approchèrent. La lumière devint plus douce, presque maternelle.

« Nougat… Opaline… »

La voix du miroir résonna, plus claire que jamais.

« Vous avez accompli ce que je ne pouvais pas faire seul. Vous avez marché dans les couloirs. Vous avez écouté les enfants. Vous avez compris leurs peurs. Vous avez transformé la lumière en douceur. Le bruit en musique. L’inconnu en aventure. »

Nougat sentit son cœur se serrer. « Mais… nous n’avons fait que les accompagner. »

« Et c’est cela, le plus grand des dons », répondit le miroir. « Les machines montrent le corps. Vous, vous avez montré le cœur. »

Opaline s’approcha encore. « Pourquoi nous avoir choisis, nous deux » Le miroir vibra doucement.

« Parce que vous êtes simples. Parce que vous êtes vrais. Parce que vous ne cherchez pas à expliquer. Vous cherchez à comprendre. Et les enfants comprennent cela mieux que tout. »

Les visages du voyage

La surface du miroir se mit à briller. Et un à un, des visages apparurent.

Lila, la petite fille aux tresses brunes, souriant après sa radiographie. Tom, le garçon au bateau en bois, émerveillé par son échographie. Éloi, le blond timide, fier d’avoir traversé le scanner. Émy, la petite fille au casque rose, apaisée par la symphonie de l’IRM. Malo, qui avait assemblé les pièces de son puzzle intérieur. Nils, qui avait ouvert une porte que personne ne voyait. Félix, qui avait osé être vrai.

Tous les enfants qu’ils avaient aidés. Tous les enfants qu’ils avaient touchés.

Nougat sentit ses yeux picoter. « Ils… ils vont bien » « Oui », répondit le miroir. « Parce que vous leur avez donné ce que les machines ne peuvent pas donner : la confiance. »

Opaline murmura : « Et maintenant… que devons-nous faire » Le miroir vibra une dernière fois.

La révélation

« Vous n’êtes pas là pour rester dans ce cabanon. Vous n’êtes pas là pour rester dans un seul hôpital. Vous êtes là pour porter la lumière. Pour raconter ce que vous avez vu. Pour expliquer aux enfants du monde entier que la radiologie n’est pas un monstre, mais une étoile. Une étoile qui éclaire l’intérieur du corps. Une étoile qui aide à guérir. Une étoile qui rassure. »

Nougat sentit une chaleur douce envahir sa poitrine. « Nous devons… raconter » « Oui », répondit le miroir. « Raconter. Transmettre. Apaiser. Être les messagers de ce que vous avez appris. »

Opaline ferma les yeux. « Alors notre mission ne s’arrête jamais. » « Non », dit le miroir. « Elle se transforme. Comme la lumière. Comme les étoiles. »

Le dernier passage

La surface du miroir devint soudain transparente. Pas comme une fenêtre. Comme un horizon.

Un vent doux souffla dans le cabanon. Des particules lumineuses s’élevèrent, tournoyant autour des deux chats comme des lucioles.

« Vous pouvez revenir quand vous voulez », dit le miroir. « Mais maintenant… vous êtes libres. Libres d’aller où les enfants ont besoin de vous. Libres de porter la lumière. Libres de devenir les étoiles que vous avez suivies. »

Nougat posa une patte sur la surface du miroir. Elle était tiède. Vivante.

Opaline posa la sienne à côté. « Merci », murmura-t-elle.

Le miroir vibra une dernière fois. « Merci à vous. Allez. Le monde vous attend. »

Le retour

Quand ils sortirent du cabanon, le soleil se levait. Le ciel était immense, doré, infini.

Nougat inspira profondément. « Opaline… tu sens ça » La chatte blanche sourit.

« Oui. Le monde est plus grand que ce que nous pensions. Et nous avons une histoire à raconter. »

Ils avancèrent dans le jardin, leurs silhouettes baignées de lumière.

Le miroir des étoiles avait parlé. Et désormais, Nougat et Opaline n’étaient plus seulement deux chats.

Ils étaient devenus des passeurs de lumière. Des guides du courage. Des amis des enfants.

Et leur histoire… ne faisait que commencer.

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