🐾 Le Volcan dans la poitrine
🌋 Chapitre 1 – Le grondement invisible
Dans une maison aux volets verts, nichée au cœur d’un quartier tranquille, vivait un chat roux nommé Nougat. Son pelage flamboyant semblait capturer les rayons du soleil, et ses yeux dorés brillaient comme deux éclats d’ambre. Nougat était vif, curieux, et surtout… très expressif. Il ne savait pas cacher ce qu’il ressentait, et parfois, ses émotions prenaient toute la place.
Chaque matin, Nougat grimpait sur le rebord de la fenêtre du salon pour observer le monde. Il aimait regarder les passants, les oiseaux, les feuilles qui dansaient dans le vent. Mais ce jour-là, quelque chose était différent.
Un pigeon dodu, perché sur le toit d’en face, le fixait avec un air moqueur.
— "Alors, le chat roux, toujours coincé derrière ta vitre ? Tu crois que tu pourrais m’attraper un jour ? Avec tes pattes molles et ton air de peluche ?"
Nougat sentit une chaleur étrange monter dans sa poitrine. Ses oreilles se plaquèrent contre son crâne, ses moustaches frémirent, et ses griffes sortirent sans qu’il s’en rende compte.
— "Tu vas voir si mes pattes sont molles !" grogna-t-il, bondissant contre la vitre.
Mais le pigeon s’envola dans un éclat de rire, laissant derrière lui un nuage de plumes et de sarcasme.
Nougat resta là, le souffle court, le cœur battant, les yeux fixés sur le ciel vide. Il avait envie de hurler, de courir, de griffer quelque chose. Il ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Ce n’était pas juste de la colère. C’était… plus grand. Plus brûlant.
Opaline, sa compagne de toujours, entra dans la pièce. Elle était une chatte crème aux yeux bleus, douce et posée, comme une caresse dans le tumulte. Elle s’approcha sans bruit, s’assit à côté de Nougat, et observa son visage crispé.
— "Tu as l’air d’avoir un volcan dans la poitrine", dit-elle doucement.
Nougat tourna la tête, surpris.
— "Un quoi ?"
— "Un volcan. Tu sais, cette sensation qui monte, qui chauffe, qui menace d’exploser. C’est comme si quelque chose bouillait en toi, non ?"
Il réfléchit. Oui, c’était exactement ça. Une chaleur incontrôlable, un grondement sourd, un feu intérieur.
— "Mais pourquoi ? Je n’ai rien fait de mal. C’est ce pigeon qui m’a provoqué !"
Opaline hocha la tête.
— "La colère ne vient pas toujours de ce que les autres font. Parfois, elle vient de ce que ça réveille en nous. Ce pigeon t’a fait sentir… quoi ?"
Nougat baissa les yeux.
— "Petit. Ridicule. Impuissant."
— "Et ça, c’est douloureux. La colère est comme une armure qu’on enfile pour ne pas montrer qu’on a été blessé."
Ils restèrent silencieux un moment. Le soleil glissait lentement sur le parquet, dessinant des ombres douces autour d’eux.
— "Tu sais, dans les légendes félines, on parle du Volcan intérieur", reprit Opaline. "C’est une force puissante. Si on l’écoute, il peut nous guider. Mais si on l’ignore, il peut tout brûler."
Nougat cligna des yeux.
— "Tu crois que j’ai un volcan en moi ?"
— "Je crois que nous en avons tous un. Mais peu savent comment l’apprivoiser."
Elle se leva, étira ses pattes, et se dirigea vers la porte.
— "Viens. Je vais te montrer un endroit où tu pourras entendre ton volcan sans qu’il te fasse peur."
Nougat hésita. Il avait encore le cœur lourd, les pensées en désordre. Mais il suivit Opaline. Car au fond de lui, il savait que ce voyage serait plus qu’une promenade. Ce serait le début d’une aventure intérieure, une quête pour comprendre ce feu qui brûlait sans nom.
Et ainsi, le chat roux aux yeux dorés s’engagea sur le chemin du volcan, guidé par la chatte crème aux yeux bleus, vers un monde où les émotions avaient des couleurs, des formes, et des secrets à révéler.
🌊 Chapitre 2 – Le miroir du lac
Le chemin qu’Opaline emprunta serpentait entre les jardins, les murets de pierre et les vieux figuiers. Nougat la suivait, encore agité, les pensées en désordre. Il ne savait pas où elle l’emmenait, mais il sentait que ce n’était pas une promenade ordinaire.
Ils marchèrent longtemps, jusqu’à ce que les bruits de la ville s’effacent, remplacés par le chant discret des grillons et le murmure du vent dans les roseaux. Enfin, ils arrivèrent devant un lac. Pas un grand lac, non. Un petit miroir d’eau, entouré de saules pleureurs et de fleurs sauvages. L’endroit semblait hors du temps.
— "Bienvenue au lac des Reflets", dit Opaline en s’asseyant au bord de l’eau.
Nougat s’approcha, intrigué. L’eau était si calme qu’elle semblait figée. Il se pencha pour regarder son reflet… mais ce qu’il vit le fit reculer d’un bond.
Son visage dans l’eau n’était pas le même que celui qu’il connaissait. Ses yeux étaient plissés, ses sourcils froncés, ses moustaches hérissées. Il avait l’air… furieux.
— "C’est moi, ça ?" demanda-t-il, la voix tremblante.
— "C’est toi… quand ton volcan parle trop fort", répondit Opaline.
Nougat s’assit, les pattes croisées, le regard fixé sur l’eau.
— "Je n’aime pas ce visage."
— "Ce n’est pas une question d’aimer ou non. C’est une question de reconnaître. Ce reflet te montre ce que tu ressens, pas ce que tu es."
À ce moment-là, une silhouette émergea lentement de l’eau. Une tortue, vieille et sage, avec une carapace couverte de symboles étranges. Elle s’approcha sans bruit, ses yeux brillants d’une lumière douce.
— "Je suis Tilda, gardienne du lac. Ici, les émotions prennent forme. Et toi, jeune chat, tu portes une colère qui cherche à être entendue."
Nougat baissa les yeux.
— "Je ne sais pas quoi faire avec elle. Elle me brûle, elle me pousse à dire des choses que je ne pense pas."
Tilda hocha lentement la tête.
— "La colère est une messagère. Elle vient te dire que quelque chose ne va pas. Mais si tu la repousses, elle crie plus fort. Si tu l’écoutes, elle parle doucement."
Opaline s’approcha.
— "Essaie de lui parler. Dis-lui ce que tu ressens."
Nougat ferma les yeux. Il inspira profondément, puis murmura :
— "Je suis en colère… parce que je me suis senti humilié. Parce que j’ai eu peur d’être faible. Parce que je voulais être respecté."
Le lac frissonna. Son reflet changea. Son visage s’adoucit, ses yeux reprirent leur éclat doré.
— "Tu viens d’éteindre une première flamme", dit Tilda. "Tu as nommé ton émotion. Et une émotion nommée est une émotion apprivoisée."
Nougat ouvrit les yeux, surpris.
— "C’est tout ? Juste dire ce que je ressens ?"
— "C’est le début. Le volcan ne disparaît pas. Mais il apprend à parler sans hurler."
Opaline ronronna doucement.
— "Tu as fait un grand pas, Nougat."
Ils restèrent là, tous les trois, à regarder les reflets danser sur l’eau. Le soleil descendait lentement, teintant le ciel de rose et d’or. Et dans la poitrine de Nougat, le volcan ne grondait plus. Il murmurait. Il écoutait.
🌬️ Chapitre 3 – Les griffes du vent
Le lendemain matin, le ciel s’était assombri. Des nuages lourds s’amassaient au-dessus du quartier, et le vent soufflait avec une force inhabituelle. Les arbres ployaient, les volets claquaient, et les feuilles tourbillonnaient comme des oiseaux affolés.
Nougat, assis sur le rebord de la fenêtre, observait le chaos avec une tension grandissante. Chaque rafale semblait le provoquer. Il sentait son volcan intérieur se réveiller, grondant comme l’orage au-dessus de sa tête.
— "Ce vent me cherche", grogna-t-il. "Il me défie. Il veut me faire perdre le contrôle."
Opaline, qui tricotait paisiblement sur le canapé, leva les yeux.
— "Le vent ne te cherche pas, Nougat. Il est juste… le vent."
Mais Nougat n’écoutait plus. Il bondit sur le sol, les griffes sorties, et se mit à courir dans la maison, comme pour échapper à une force invisible. Il sauta sur les coussins, renversa une lampe, miaula de frustration.
— "Je ne peux pas rester calme ! Ce vent me rend fou !"
Opaline se leva, s’approcha lentement, et posa une patte sur son épaule.
— "Alors viens. Je vais te montrer comment faire la paix avec le vent."
Ils sortirent dans le jardin, malgré les bourrasques. Opaline s’assit sous le vieux cerisier, les yeux fermés, le dos droit.
— "Assieds-toi. Respire avec moi."
Nougat hésita, puis s’installa à ses côtés. Le vent fouettait son pelage, mais il tenta de l’ignorer.
— "Inspire… par le nez. Expire… par la bouche. Laisse le vent passer à travers toi, sans t’emporter."
Ils respirèrent ensemble. Une fois. Deux fois. Dix fois.
Peu à peu, Nougat sentit son volcan se calmer. La chaleur dans sa poitrine se transformait en tiédeur. Ses griffes rentrèrent. Son souffle devint plus profond.
— "Je ne peux pas contrôler le vent", murmura-t-il. "Mais je peux contrôler ce que je fais quand il souffle."
Opaline ouvrit les yeux et sourit.
— "Exactement. Le vent est comme la colère. Il peut tout renverser… ou simplement passer, si tu le laisses faire."
Ils restèrent là, à respirer, à écouter le monde. Le vent continuait de souffler, mais il n’avait plus de prise sur Nougat. Il était là, présent, mais inoffensif.
Et dans le cœur du chat roux, le volcan s’était apaisé. Il avait appris que parfois, pour ne pas exploser, il suffisait… de respirer.
🌸 Chapitre 4 – Le jardin des émotions
Le soleil s’était levé avec douceur ce matin-là, comme s’il voulait caresser le monde plutôt que l’éblouir. Les rayons glissaient sur les toits, les gouttes de rosée scintillaient sur les feuilles, et l’air avait cette fraîcheur tendre qui annonce une journée pleine de promesses.
Nougat se réveilla avec une sensation étrange. Le volcan dans sa poitrine ne grondait pas… mais il fumait encore. Une chaleur sourde, comme une braise qui attendait qu’on souffle dessus.
Opaline l’attendait devant la porte, son pelage crème parfaitement lustré, ses yeux bleus pétillants d’une idée.
— "Aujourd’hui, je t’emmène dans un endroit que peu de chats connaissent. Un lieu où les émotions poussent comme des fleurs."
Nougat cligna des yeux.
— "Des fleurs… d’émotions ?"
— "Oui. Le jardin des émotions. Mais attention, ce jardin ne s’ouvre qu’à ceux qui sont prêts à regarder en eux."
Ils marchèrent longtemps, traversant des ruelles oubliées, des sentiers bordés de lavande, des ponts de bois moussus. Enfin, ils arrivèrent devant une grille ancienne, tressée de lianes et de branches. Opaline posa une patte sur le loquet, et la grille s’ouvrit dans un soupir.
Le jardin était immense. Des allées sinueuses menaient à des bosquets colorés, des fontaines chantaient doucement, et partout, des fleurs d’une beauté étrange s’épanouissaient.
— "Chaque fleur ici représente une émotion", expliqua Opaline. "Certaines sont douces, d’autres piquantes. Certaines brillent, d’autres se cachent. Mais toutes ont leur place."
Nougat s’avança, fasciné. Il vit une fleur jaune éclatante qui vibrait doucement.
— "Celle-ci ?"
— "La joie", dit Opaline. "Elle aime la lumière et les rires."
Plus loin, une fleur bleue pâle semblait pleurer des gouttes de rosée.
— "La tristesse. Elle pousse mieux à l’ombre, mais elle est essentielle. Elle nourrit les racines du cœur."
Puis Nougat aperçut une fleur rouge flamboyante, aux pétales dentelés, presque brûlants. Il s’en approcha, attiré.
— "Et celle-là ?"
— "La colère", murmura Opaline. "Elle est magnifique… mais dangereuse si on la cueille sans précaution."
Nougat tendit la patte, curieux. Dès qu’il toucha la fleur, une chaleur intense envahit son corps. Il recula, haletant.
— "Elle m’a brûlé !"
— "Parce que tu ne l’as pas regardée avec respect. La colère ne se cueille pas. Elle s’apprivoise."
Opaline s’approcha, posa sa patte sur la tige, et murmura :
— "Je t’écoute. Je te reconnais. Tu as le droit d’exister."
La fleur rouge se calma, ses pétales se refermèrent doucement, et elle devint tiède au toucher.
— "Tu vois ? Quand on parle à une émotion avec douceur, elle cesse de vouloir crier."
Nougat s’assit devant la fleur, les yeux brillants.
— "Je suis en colère… parce que je veux être entendu. Parce que j’ai peur qu’on m’oublie. Parce que je veux compter."
La fleur rouge s’ouvrit à nouveau, mais cette fois, elle ne brûlait pas. Elle diffusait une chaleur réconfortante, comme un feu de cheminée.
— "Tu viens de transformer ta colère en force", dit Opaline. "Elle peut éclairer ton chemin, si tu la portes avec sagesse."
Ils continuèrent leur exploration. Nougat découvrit la peur, une fleur grise qui tremblait au moindre souffle. L’amour, une fleur rose qui s’enroulait autour des autres. La honte, une fleur qui se cachait sous les feuilles. Et l’espoir, une fleur verte qui poussait même dans les fissures du sol.
Chaque émotion avait sa forme, son parfum, sa manière d’exister.
— "Ce jardin est en moi, n’est-ce pas ?" demanda Nougat.
— "Oui. Il est en chacun de nous. Mais rares sont ceux qui prennent le temps d’y marcher."
Ils restèrent là jusqu’au soir, à écouter les murmures des fleurs, à parler à leurs émotions, à apprendre leur langage.
Et quand ils quittèrent le jardin, Nougat sentit que son volcan avait changé. Il n’était plus un monstre menaçant. Il était devenu un jardinier. Un gardien du feu. Un être capable de transformer la lave en lumière.
🦁 Chapitre 5 – Le rugissement du lion
Le ciel était d’un bleu profond ce jour-là, sans un nuage à l’horizon. L’air était chaud, chargé d’odeurs de terre et de fleurs sauvages. Nougat et Opaline marchaient depuis l’aube, leurs pattes foulant un sentier bordé de pierres dorées. Ils suivaient les murmures du vent, qui semblait les guider vers un lieu oublié.
— "Où allons-nous ?" demanda Nougat, intrigué.
— "Vers la clairière du rugissement", répondit Opaline. "Un endroit où la colère ne se cache pas… mais où elle crie."
Nougat sentit son volcan intérieur frémir. Il avait appris à nommer ses émotions, à les observer, à les respirer. Mais parfois, malgré tout, la colère revenait, comme une vague imprévisible.
Ils arrivèrent devant une clairière entourée de grands arbres noueux. Au centre, un lion majestueux tournait en rond. Sa crinière dorée brillait sous le soleil, et ses yeux lançaient des éclairs. À chaque pas, il rugissait, un cri puissant qui faisait trembler les feuilles.
— "RRRRRAAAAAAAHHHHHH !"
Nougat recula, impressionné.
— "Il est… terrifiant."
— "Il est en colère", dit Opaline. "Mais regarde bien."
Le lion rugissait, encore et encore. Mais ses rugissements n’étaient pas dirigés vers quelqu’un. Ils semblaient… vides. Comme s’il criait dans le vent.
Nougat s’approcha prudemment.
— "Pourquoi cries-tu comme ça ?"
Le lion s’arrêta, le regarda, et répondit d’une voix grave :
— "Parce que si je ne rugis pas, je disparais."
Nougat cligna des yeux.
— "Disparaître ?"
— "Quand j’étais petit, on m’a abandonné. J’ai appris à rugir pour qu’on m’écoute. Pour qu’on me voie. Pour qu’on me craigne. La colère est devenue mon armure."
Il s’assit lourdement, les épaules basses.
— "Mais parfois… je ne sais plus si je rugis pour me défendre ou pour ne pas pleurer."
Un silence s’installa. Nougat s’approcha encore.
— "Moi aussi, je me suis senti petit. Ridiculisé. J’ai cru que crier me rendrait fort."
Le lion le regarda, surpris.
— "Et ça t’a aidé ?"
— "Un peu. Mais ça m’a aussi éloigné de ceux que j’aime."
Opaline s’assit à côté d’eux.
— "La colère peut être une armure… mais elle peut aussi devenir une prison. Si on ne l’ouvre pas, on reste seul dedans."
Le lion baissa la tête.
— "Je ne sais pas comment faire autrement."
Opaline sourit.
— "Alors commence par dire ce que tu ressens. Pas ce que tu veux montrer. Ce que tu ressens vraiment."
Le lion inspira profondément.
— "Je suis triste. Je suis fatigué. J’ai peur d’être oublié."
Ses rugissements cessèrent. Le vent se calma. Les oiseaux recommencèrent à chanter.
Nougat posa sa patte sur celle du lion.
— "Tu n’es pas seul."
Ils restèrent là, tous les trois, à parler, à écouter, à partager leurs blessures. Et dans la poitrine du lion, le volcan ne rugissait plus. Il pleurait doucement, comme une pluie chaude sur une terre sèche.
Nougat comprit alors que la colère n’était pas toujours un cri de guerre. Parfois, c’était un appel à l’aide. Et que répondre à ce cri avec douceur pouvait transformer un rugissement… en murmure de guérison.
🧠 Chapitre 6 – Le labyrinthe des pensées
Le ciel était voilé ce matin-là. Une brume légère recouvrait les toits, et même les oiseaux semblaient chanter plus bas. Nougat se réveilla avec une sensation étrange : son volcan ne grondait pas, mais quelque chose d’autre le dérangeait. Une sorte de brouillard dans sa tête, un enchevêtrement de pensées qui tournaient en rond.
— "Je ne comprends pas", dit-il à Opaline. "Je ne suis pas en colère… mais je me sens perdu. Comme si mes pensées me piégeaient."
Opaline l’observa avec tendresse.
— "Alors il est temps de visiter le labyrinthe."
— "Le labyrinthe ?"
— "Celui qui existe dans chaque esprit. Là où les pensées se répètent, se déforment, se déguisent. Si tu veux comprendre ton volcan, tu dois apprendre à marcher dans ce labyrinthe sans te perdre."
Ils quittèrent la maison, traversèrent un champ de coquelicots, et arrivèrent devant une grande porte de pierre. Gravée dans le linteau, une phrase : “Ce que tu crois te guide. Ce que tu ignores t’égare.”
La porte s’ouvrit dans un souffle, et Nougat entra.
Le labyrinthe était immense. Des murs de buissons sombres, des chemins qui se croisaient, des impasses, des virages serrés. À chaque tournant, une voix s’élevait, comme un murmure dans le vent.
— "Tu n’es pas assez rapide."
— "Tu es ridicule."
— "Tu ne vaux rien."
Nougat s’arrêta, les oreilles basses.
— "Qui parle ?"
— "Tes pensées", répondit Opaline, qui marchait derrière lui. "Celles que tu crois vraies parce qu’elles sont familières."
— "Mais elles me font mal."
— "Alors il faut les regarder en face."
Ils avancèrent. À chaque mur, une phrase blessante apparaissait, écrite en lettres de fumée. Nougat tenta de les ignorer, mais elles le suivaient, s’accrochaient à ses pattes, à son cœur.
— "Je ne peux pas continuer", dit-il, épuisé.
Opaline s’arrêta, sortit une petite lanterne de sa sacoche.
— "Tiens. Allume-la avec une pensée vraie."
— "Une pensée vraie ?"
— "Oui. Une pensée qui vient de ton cœur, pas de ta peur."
Nougat ferma les yeux. Il chercha. Et murmura :
— "Je suis courageux. J’ai déjà traversé des tempêtes."
La lanterne s’illumina, projetant une lumière douce sur les murs. Les phrases de fumée se dissipèrent.
Ils continuèrent. À chaque pensée sombre, Nougat allumait une lanterne :
— "Je suis aimé."
— "Je peux apprendre."
— "Je suis plus que mes erreurs."
Le labyrinthe s’éclairait peu à peu, devenant un jardin de lumière.
Enfin, ils arrivèrent au centre. Une clairière paisible, avec un bassin limpide. Nougat s’y pencha, et vit son reflet. Pas celui de la colère. Celui d’un chat fatigué, mais lucide. Un chat qui avait affronté ses pensées et les avait transformées.
— "Tu viens de comprendre une chose essentielle", dit Opaline. "La colère se nourrit de ce que tu crois sur toi. Si tu changes ces croyances, tu changes ton volcan."
Nougat sourit.
— "Alors je vais continuer à allumer des lanternes. Même quand le brouillard revient."
Ils quittèrent le labyrinthe, le cœur plus léger. Et dans la poitrine de Nougat, le volcan ne brûlait plus de rage. Il brillait d’une lumière nouvelle : celle de la conscience.
💥 Chapitre 7 – Le volcan explose
Depuis leur visite au labyrinthe des pensées, Nougat se sentait plus léger. Il avait appris à reconnaître ses idées sombres, à les transformer en lanternes, à éclairer son chemin intérieur. Mais malgré tous ses efforts, le volcan en lui n’était pas éteint. Il dormait, oui. Mais il dormait avec un œil ouvert.
Ce matin-là, le ciel était gris. Une pluie fine tombait sur les toits, et l’air avait cette lourdeur qui précède les orages. Nougat était nerveux. Rien ne semblait aller comme il voulait. Son coussin était mouillé, sa gamelle vide, et Opaline chantonnait dans la cuisine comme si tout était parfait.
— "Tu peux arrêter de faire comme si tout allait bien ?" grogna-t-il.
Opaline se retourna, surprise.
— "Je chantonne pour me réchauffer. Il fait froid ce matin."
— "Tu fais toujours ça. Tu ignores les problèmes. Tu fais semblant. Tu ne comprends rien !"
Opaline s’immobilisa. Ses yeux bleus se voilèrent.
— "Nougat… qu’est-ce qui te met dans cet état ?"
Mais Nougat ne voulait pas parler. Il voulait crier. Il voulait que sa colère sorte, qu’elle brûle tout sur son passage. Il voulait que quelqu’un sente ce qu’il ressentait.
— "Tu crois que tu es meilleure que moi ? Avec tes phrases sages et ton calme ? Tu m’étouffes ! Tu me fais sentir comme un idiot !"
Opaline recula, blessée.
— "Je ne voulais pas…"
— "Tu ne veux jamais rien ! Tu es juste là, à me regarder comme si j’étais un problème à résoudre !"
Le volcan explosa.
Les mots sortirent comme des flammes. Ils n’étaient pas réfléchis. Ils étaient brutaux, tranchants, cruels. Et ils frappèrent Opaline en plein cœur.
Elle ne répondit pas. Elle ne pleura pas. Elle se contenta de tourner les talons et de quitter la pièce, sans un bruit.
Le silence qui suivit fut plus lourd que la colère elle-même.
Nougat resta seul, au milieu du salon. Les coussins renversés, la gamelle vide, le cœur en feu. Mais ce n’était plus la colère qui brûlait. C’était le regret.
Il se revit, quelques jours plus tôt, dans le jardin des émotions, caressant la fleur rouge avec douceur. Il se revit dans le labyrinthe, allumant des lanternes pour chasser les pensées sombres. Et maintenant… il avait tout oublié. Il avait laissé le volcan parler à sa place.
Il s’assit, les épaules basses, les yeux humides.
— "Qu’ai-je fait ?"
Il se souvenait des mots de Tilda, la tortue du lac :
"La colère est une messagère. Mais si tu l’ignores, elle crie. Et si tu la laisses crier trop fort, elle peut blesser."
Il avait blessé Opaline. Celle qui l’avait guidé, soutenu, aimé. Celle qui avait cru en lui.
Le volcan s’était exprimé… mais à quel prix ?
Nougat resta là, longtemps, à écouter le silence. Il comprit alors que la colère n’était pas seulement une émotion à apprivoiser. C’était une responsabilité. Car une fois qu’elle sort, on ne peut pas toujours réparer ce qu’elle détruit.
Et dans sa poitrine, le volcan ne grondait plus. Il pleurait. Il pleurait des larmes de lave, chaudes et douloureuses. Des larmes de culpabilité.
🌫️ Chapitre 8 – Les cendres du pardon
Le lendemain, la maison était silencieuse. Trop silencieuse.
Le coussin d’Opaline était vide. Sa gamelle n’avait pas été touchée. Son parfum de lavande ne flottait plus dans l’air. Nougat errait de pièce en pièce, le cœur lourd, les oreilles basses, les yeux pleins de regrets.
Il revoyait la scène de la veille, encore et encore. Ses mots, tranchants comme des griffes. Le regard blessé d’Opaline. Son départ, sans un mot. Et ce vide, maintenant, qui résonnait dans chaque recoin de la maison.
— "Je l’ai perdue", murmura-t-il.
Mais une petite voix en lui, faible mais tenace, lui souffla : "Tu peux encore réparer."
Alors Nougat sortit. Il marcha longtemps, interrogeant les oiseaux, les écureuils, les papillons. Tous avaient vu passer une chatte crème, silencieuse, le regard triste. Elle s’était dirigée vers la forêt des Brumes, un lieu que peu de félins osaient explorer.
Le soleil était déjà haut quand Nougat atteignit les premiers arbres. La lumière y pénétrait à peine, filtrée par un voile de brume argentée. Chaque pas soulevait un nuage de feuilles mortes. Le silence était profond, presque sacré.
— "Opaline ?" appela-t-il. Mais seule la brume lui répondit.
Il marcha encore, jusqu’à ce qu’il aperçoive une silhouette perchée sur une branche tordue : un hibou immense, au plumage gris perle, aux yeux d’ambre.
— "Tu cherches quelqu’un", dit le hibou d’une voix grave et lente.
— "Oui. Une amie. Je l’ai blessée. Je veux lui demander pardon."
Le hibou cligna lentement des yeux.
— "Le pardon n’est pas une clé magique. Ce n’est pas un mot qui efface. C’est un feu doux, qui réchauffe les cendres sans les faire disparaître."
Nougat s’assit, attentif.
— "Mais comment faire ? Je regrette… vraiment."
— "Alors commence par reconnaître. Pas seulement ce que tu as dit, mais ce que tu as causé. La douleur. La peur. Le silence."
Le hibou descendit de sa branche, déployant ses ailes avec majesté.
— "Le pardon, petit chat, ce n’est pas demander à l’autre d’oublier. C’est lui offrir un espace pour guérir. Et c’est aussi te pardonner à toi-même, pour ne pas rester prisonnier de ta faute."
Nougat sentit une larme couler sur sa joue.
— "Je ne voulais pas la blesser. Je voulais juste… qu’elle m’entende."
— "Alors va. Dis-lui cela. Et écoute ce qu’elle a à dire. Le pardon commence là."
Guidé par les paroles du hibou, Nougat reprit sa marche. Il traversa un ruisseau, grimpa sur des rochers moussus, et enfin, au détour d’un vieux chêne, il la vit.
Opaline. Assise sur une pierre, le regard perdu dans les brumes.
Il s’approcha lentement, le cœur battant.
— "Opaline…"
Elle tourna la tête. Ses yeux étaient calmes, mais tristes.
— "Je suis désolé", dit-il. "Pas juste pour les mots. Pour la blessure. Pour t’avoir fait sentir seule. Pour avoir laissé mon volcan parler à ma place."
Un long silence s’installa.
Puis Opaline se leva, s’approcha, et posa sa tête contre la sienne.
— "Je t’ai entendu. Et je t’ai attendu."
— "Tu me pardonnes ?"
— "Je te pardonne. Parce que tu as vu. Parce que tu es revenu. Et parce que moi aussi, parfois, j’ai un volcan."
Ils restèrent là, enlacés, au milieu des brumes. Et dans la poitrine de Nougat, les cendres du volcan se transformèrent en terre fertile. Prêtes à accueillir quelque chose de nouveau.
Le pardon.
🌬️ Chapitre 9 – Le souffle du calme
Le vent avait changé.
Il ne soufflait plus avec colère, mais avec douceur. Il caressait les feuilles, faisait danser les herbes hautes, et portait avec lui une odeur de mousse et de bois mouillé. C’était un vent de réconciliation. Un vent de renouveau.
Nougat et Opaline marchaient côte à côte, silencieux mais unis. Depuis leur retrouvaille dans la forêt des Brumes, quelque chose avait changé entre eux. Une tendresse plus profonde, née de la blessure et du pardon. Une confiance reconstruite, pierre après pierre.
— "Je veux apprendre à ne plus laisser mon volcan exploser", dit Nougat. "Je veux construire un abri à l’intérieur de moi. Un endroit où je peux me réfugier quand la lave monte."
Opaline sourit.
— "Alors construisons-le ensemble."
Ils s’installèrent dans une clairière paisible, entourée de bouleaux argentés. Le sol était tapissé de mousse, et un petit ruisseau chantait tout près. C’était l’endroit parfait pour bâtir ce qu’Opaline appelait : la boîte à ronrons.
— "C’est une boîte invisible", expliqua-t-elle. "Mais elle est bien réelle. Elle contient tout ce qui t’apaise. Tout ce qui t’aide à revenir à toi quand tu es emporté."
— "Comme quoi ?"
— "Comme ton souffle. Comme une image qui te fait du bien. Une odeur. Une chanson. Une pensée douce. Un souvenir heureux."
Ils commencèrent à la remplir, chacun à sa manière.
Nougat ferma les yeux.
— "Je mets dedans… le bruit de la pluie sur le toit. Le parfum du pain chaud. Le ronron de maman quand j’étais petit. Le soleil sur mon dos. Et… ton regard, quand tu me pardonnes."
Opaline ferma les siens.
— "Je mets… le silence du matin. Le goût du lait tiède. Le bruissement des feuilles. Le rire d’un chaton. Et… ta voix, quand tu dis que tu veux apprendre."
Ils restèrent là, à remplir leur boîte invisible, jusqu’à ce qu’elle déborde de douceur.
Puis Opaline lui apprit à respirer.
— "Assieds-toi. Ferme les yeux. Pose une patte sur ton cœur. Inspire lentement… comme si tu sentais une fleur. Expire doucement… comme si tu soufflais sur une plume."
Nougat s’exécuta. Au début, son souffle était saccadé. Mais peu à peu, il devint plus fluide, plus profond. Il sentit son volcan se calmer, comme si la lave se transformait en rivière tiède.
— "Quand tu sens que tout monte, reviens ici", dit Opaline. "Dans ton souffle. Dans ta boîte à ronrons. Dans ton abri intérieur."
Ils passèrent la journée à créer des rituels : une chanson à fredonner quand la colère arrive, une posture pour se recentrer, un mot secret pour se rappeler qu’ils ne sont pas seuls.
— "Quel est ton mot secret ?" demanda Nougat.
— "Ancrage", répondit Opaline. "Et toi ?"
— "Lumière."
Ils se regardèrent, complices.
Le soir venu, ils s’allongèrent côte à côte, le museau dans les étoiles.
— "Tu sais", dit Nougat, "je croyais que la force, c’était rugir plus fort que les autres. Mais maintenant, je crois que la vraie force, c’est de savoir quand se taire. Quand respirer. Quand écouter."
Opaline ronronna doucement.
— "Et de savoir quand demander de l’aide."
Dans la poitrine de Nougat, le volcan était toujours là. Mais il ne faisait plus peur. Il était devenu un feu de camp. Un feu autour duquel on pouvait s’asseoir, se réchauffer, et raconter des histoires.
Et dans la nuit paisible, deux chats veillaient sur leur feu intérieur, gardiens du calme, bâtisseurs de paix.
🔥 Chapitre 10 – Le feu qui éclaire
Depuis qu’ils avaient construit leur boîte à ronrons, Nougat et Opaline vivaient dans une paix nouvelle. Chaque matin, ils prenaient le temps de respirer, de nommer leurs émotions, de se reconnecter à leur volcan intérieur. Le feu était toujours là, mais il ne brûlait plus sans raison. Il éclairait.
Un jour, alors qu’ils se promenaient près du vieux moulin, ils entendirent des cris étouffés. Des voix moqueuses, des ricanements. Ils s’approchèrent doucement et découvrirent un petit hérisson recroquevillé sous un buisson, entouré de trois corneilles noires.
— "Regardez-le ! Il est tout piquant, mais il tremble comme une feuille !"
— "Tu crois qu’il peut se défendre ? Il est minuscule !"
Le hérisson ne disait rien. Il avait les yeux pleins de larmes, ses piquants repliés, son souffle court.
Nougat sentit son volcan se réveiller. Mais cette fois, ce n’était pas une colère égoïste. C’était une flamme juste. Une chaleur qui disait : "Ce n’est pas acceptable."
Il s’avança, les yeux dorés brillants, le dos droit.
— "Ça suffit."
Les corneilles se tournèrent vers lui, surprises.
— "Et toi, le chat roux, tu veux jouer les héros ?"
— "Je veux que vous partiez. Ce hérisson n’a rien fait. Il mérite le respect."
Opaline s’approcha à son tour, calme mais ferme.
— "La moquerie est une faiblesse déguisée. La vraie force, c’est de protéger."
Les corneilles hésitèrent, puis s’envolèrent dans un cri agacé.
Le silence revint.
Nougat s’approcha du hérisson, qui le regardait avec étonnement.
— "Tu… tu n’as pas eu peur ?"
— "Si. Mais j’ai appris que la peur peut devenir courage, quand elle est guidée par le cœur."
Le hérisson se redressa, ses piquants frémissant doucement.
— "Merci. Je croyais que j’étais seul."
Opaline sourit.
— "Tu ne l’es plus."
Ils s’assirent tous les trois sous le buisson, et le hérisson raconta son histoire : les moqueries, la solitude, le sentiment d’être trop différent pour être aimé.
— "Je me suis souvent mis en colère", dit-il. "Mais je ne savais pas quoi en faire. Alors je me suis replié."
Nougat hocha la tête.
— "La colère peut être une lumière. Elle peut te dire que quelque chose est injuste. Mais elle doit être portée avec douceur, comme une lanterne, pas comme une torche."
Ils parlèrent longtemps, et le hérisson décida de créer sa propre boîte à ronrons. Il y mit : le parfum des mûres, le bruit des feuilles, le souvenir de ce jour où quelqu’un l’avait défendu.
Avant de partir, il regarda Nougat dans les yeux.
— "Tu es un gardien du feu."
Nougat sourit.
— "Et toi, tu es un porteur de lumière."
Ils se séparèrent, le cœur chaud, les pas légers.
Et dans la poitrine de Nougat, le volcan brillait. Non pas pour détruire. Mais pour éclairer les chemins de ceux qui avaient besoin d’un peu de chaleur.
🐾 Chapitre 11 – Le cercle des félins
Le printemps était revenu.
Les arbres bourgeonnaient, les oiseaux construisaient leurs nids, et l’air vibrait d’une énergie nouvelle. Dans le quartier, les animaux semblaient plus joyeux, plus curieux, plus ouverts. Et pourtant, Nougat sentait que quelque chose manquait encore.
— "Nous avons appris à écouter notre volcan", dit-il à Opaline. "Mais les autres ? Qui leur apprend ?"
Opaline réfléchit, les yeux tournés vers le ciel.
— "Et si nous les réunissions ? Pour parler. Pour partager. Pour apprendre ensemble."
C’est ainsi que naquit l’idée du cercle des félins.
Ils passèrent plusieurs jours à préparer l’événement. Ils accrochèrent des feuilles colorées sur les arbres, écrivirent des invitations sur des écorces, déposèrent des messages dans les terriers et les nids. Le mot se répandit vite : "Venez parler de ce que vous ressentez. Venez écouter. Venez être vus."
Le jour venu, la clairière du vieux chêne se remplit peu à peu. Il y avait des chats, bien sûr, mais aussi des chiens, des lapins, des oiseaux, des souris, des renards. Tous s’étaient installés en cercle, curieux, un peu nerveux.
Opaline prit la parole en première.
— "Bienvenue. Ici, il n’y a pas de jugement. Il n’y a pas de honte. Il n’y a que des cœurs qui veulent se comprendre."
Elle tendit une pierre ronde, lisse et tiède.
— "Celui qui tient la pierre peut parler. Les autres écoutent."
Le premier à la prendre fut un vieux corbeau.
— "Je suis souvent en colère. Je crie. Je pique. Mais en vérité… j’ai peur d’être oublié."
Un silence respectueux suivit ses mots. Puis un jeune lapin prit la pierre.
— "Moi, je pleure souvent. Et on me dit que je suis faible. Mais je crois que pleurer, c’est être fort."
Une chatte noire s’avança.
— "Je me sens seule. Même entourée. Et parfois, je me mets en colère juste pour qu’on me remarque."
Nougat prit la pierre à son tour.
— "J’ai blessé celle que j’aime. Parce que je n’avais pas appris à parler autrement. Mais j’ai découvert que la colère peut être transformée. Qu’elle peut devenir lumière."
Les témoignages se succédèrent. Certains pleuraient. D’autres riaient. Tous se sentaient un peu plus légers, un peu plus vrais.
Puis Opaline proposa un rituel.
— "Fermez les yeux. Posez une patte sur votre cœur. Et dites, en silence, une émotion que vous avez souvent. Puis imaginez-la comme une fleur. Quelle couleur a-t-elle ? Quelle forme ? Quelle odeur ?"
Le cercle se remplit de murmures intérieurs. Des fleurs invisibles s’ouvraient dans chaque poitrine.
— "Maintenant, imaginez que cette fleur est entourée de lumière. Elle n’est pas mauvaise. Elle est vivante. Elle vous parle."
Quand tous rouvrirent les yeux, quelque chose avait changé. Les regards étaient plus doux. Les souffles plus profonds. Les cœurs plus ouverts.
Le cercle se termina par un chant. Un chant simple, né de la terre, du vent, des voix mêlées. Un chant qui disait : "Nous sommes ensemble. Nous sommes vivants. Nous sommes capables de transformer."
Et dans la poitrine de Nougat, le volcan vibrait doucement. Il n’était plus un secret. Il était devenu un feu partagé. Un feu qui réchauffait, qui reliait, qui éclairait.
🌋 Chapitre 12 – Le volcan dans la poitrine
L’été s’installait doucement. Les jours s’étiraient comme des chats au soleil, les nuits étaient tièdes et étoilées. Le quartier vibrait d’une énergie paisible. Les arbres bruissaient de secrets, les fleurs ouvraient leurs cœurs, et les animaux semblaient marcher avec plus de lenteur, comme s’ils savouraient chaque instant.
Nougat était allongé sur le toit de la maison, les yeux mi-clos, le ventre tiède de lumière. À côté de lui, Opaline ronronnait doucement, sa queue enroulée autour de la sienne.
— "Tu penses encore à lui ?" demanda-t-elle.
— "À qui ?"
— "Au volcan."
Nougat sourit.
— "Oui. Mais il ne me fait plus peur. Il est là, je le sens. Il respire avec moi. Il me parle parfois. Mais je sais l’écouter maintenant."
Il posa une patte sur sa poitrine.
— "Avant, je croyais que la colère était un ennemi. Maintenant, je sais que c’est une voix. Une voix qui me dit quand quelque chose ne va pas. Une voix qui me demande d’agir, mais pas de détruire."
Opaline hocha la tête.
— "Tu es devenu un gardien du feu."
Ils restèrent silencieux un moment, bercés par le vent chaud.
Puis Nougat se leva, regarda le ciel, et dit :
— "Tu sais ce que je vois là-haut ?"
— "Dis-moi."
— "Je vois un volcan. Mais pas un volcan qui explose. Un volcan endormi. Majestueux. Puissant. Et au sommet, une lumière. Comme une étoile née de la lave."
Opaline se leva à son tour.
— "Tu es cette lumière, Nougat. Tu as traversé la colère, la honte, la peur. Tu as appris à nommer, à respirer, à réparer. Tu as transformé la lave en lumière."
Ils descendirent du toit et marchèrent jusqu’au jardin. Là, sous le cerisier, les fleurs du jardin des émotions avaient poussé. La joie, la tristesse, la peur, la colère, l’amour… toutes coexistaient, en équilibre.
Nougat s’approcha de la fleur rouge. Elle brillait doucement, sans brûler.
— "Merci", lui dit-il.
Puis il se tourna vers Opaline.
— "Merci à toi. Pour m’avoir montré le chemin. Pour m’avoir attendu. Pour m’avoir aimé, même quand j’étais en feu."
Opaline le regarda avec tendresse.
— "Merci à toi. Pour avoir eu le courage de changer."
Ils s’assirent côte à côte, les yeux tournés vers le ciel.
Et dans la poitrine de Nougat, le volcan vibrait. Non plus comme une menace, mais comme une promesse. Une promesse de vie, de force, de vérité.
Car désormais, il savait.
Le volcan dans la poitrine n’est pas là pour détruire.
Il est là pour éclairer.
✨ FIN ✨

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